Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/381

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formes conſtantes, ni propriétés réelles, le magiſtrat eſt peu de choſe, ou n’eſt rien ; il attend un ſigne pour être ce qu’on voudra. Le grand ſeigneur rampe devant le prince, & les peuples rampent devant le grand ſeigneur. La dignité naturelle de l’homme s’eſt éclipsée. Il n’a pas la moindre idée de ſes droits. Autour du deſpote, de ſes ſuppôts, de ſes favoris, les ſujets ſont foulés aux pieds, avec la même inadvertance, que nous écraſons les inſectes qui fourmillent dans la pouſſière de nos campagnes. La morale eſt corrompue. Il vient un moment où les vexations les plus criantes, les attentats les plus inouïs ont perdu leur caractère d’atrocité & ceſſent de révolter. Celui qui prononceroit les noms de vertu, de patriotiſme, d’équité, ne ſeroit qu’une tête exaltée, expreſſion qui décèle toujours une indulgence abjecte pour des déſordres dont on profite. La maſſe de la nation devient diſſolue & ſuperſtitieuſe : car le deſpotiſme ne peut ni s’établir ſans l’entremiſe, ni ſe ſoutenir ſans l’étai de la ſuperſtition : car la ſervitude conduit à la débauche, qui conſole & qui n’eſt jamais réprimée. Les hommes inſtruits, quand il