Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/256

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n’auroient connu aucun débouché pour leurs productions ; ils n’auroient eu aucune voie pour ſe procurer les premiers beſoins. Leur deſtinée doit, avec le tems, devenir un peu moins fâcheuſe, & parce que les communications de l’Eſpagne avec ſes colonies ont été débarraſſées de beaucoup d’entraves, & parce qu’il a été accordé aux iſles Françoiſes la liberté de tirer de cette grande province, ſur leurs propres navires, des bois & des ſubſiſtances. Cependant la cour de Madrid a dans le nouvel hémiſphère tant d’autres intérêts plus grands, qu’on peut prédire qu’elle ne s’occupera jamais bien sérieuſement des proſpérités de la Louyſiane.

Mais peut-on plaindre bien vivement la triſte ſituation de ces colons qui ont laiſſé égorger leurs compatriotes ? Leur misère n’eſt-elle pas le vrai châtiment qu’ils ont mérité ? La conſcience, ce juge sévère de tous les devoirs, ne leur crie-t-elle pas, ſans interruption : « Tu avois des magiſtrats honnêtes & vertueux qui veilloient le jour à ton bonheur, la nuit à ta sécurité, pendant tout le cours de l’année à tes intérêts ; tu avois à tes côtés des concitoyens