Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/527

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ignoré dans l’ancien monde, & n’eſt guère plus connu dans le nouveau. En ſeroit-elle plus malheureuſe ? Je ne le crois pas.

Qu’on parcoure l’hiſtoire des nations anciennes & modernes, & l’on n’en verra preſque aucune, dont la ſplendeur ne ſe ſoit accrue aux dépens de ſa félicité. Des peuples, dont il ne ſeroit fait aucune mention dans les triſtes annales du monde, n’auroient été ni agreſſeurs, ni attaqués. Ils n’auroient pas troublé la paix des autres. Des ennemis éloignés ou voiſins, n’auroient pas troublé la leur. Ils n’auroient point eu de héros qui fuſſent rentrés dans leur patrie, chargés de dépouilles de l’ennemi. Ils n’auroient point eu d’hiſtorien qui racontât ou leurs misères ou leurs crimes. On n’y auroit point frémi d’âge en âge, à l’aſpect de ces monumens, qui retracent par-tout l’effuſion du ſang, des fers portés au loin ou brisés chez ſoi. Des factions politiques ne les auroient point déchirés. Des opinions abſurdes ne les auroient point enivrés. L’oppreſſion de la tyrannie n’y auroit point fait couler des larmes, ni ſuſcité des révoltes. On ne s’y ſeroit point délivré d’un deſpote par le poignard ; on n’y eût point ex-