Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/63

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qui, dans nos ſociétés, affoibliſſent toutes les liaiſons, ſans en excepter les plus douces & les plus ſacrées. C’eſt là que le cœur d’un homme ſe choiſit un cœur pour y dépoſer ſes pensées, ſes ſentimens, ſes projets, ſes peines, ſes plaiſirs. Tout devient commun entre deux amis. Ils s’attachent pour jamais l’un à l’autre ; ils combattent à côté l’un de l’autre ; ils meurent conſtamment ſur le corps l’un de l’autre. Alors même, ils ont la douce perſuaſion que leur séparation ne ſera que momentanée, & qu’ils le rejoindront dans un autre monde, pour ne ſe plus quitter, & ſe rendre à jamais les plus grands ſervices. Un Iroquois chrétien, mais qui ne ſe conduiſoit pas ſelon les maximes de l’évangile, étoit menacé des peines éternelles. Il demanda ſi ſon ami enterré depuis peu de jours étoit en enfer. J’ai de fortes raiſons pour croire qu’il n’y a pas été précipité, répondit le miſſionnaire. S’il en eſt ainſi, je ne veux pas y aller, reprit le ſauvage. Il s’engagea, ſur le champ, à changer de mœurs ; & ſa vie fut toujours depuis très-édifiante.

Les ſauvages ont une pénétration & une