Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/64

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ſagacité qui étonnent tout homme qui ne ſait pas combien nos arts & nos méthodes ont rendu notre eſprit pareſſeux ; parce que nous n’avons preſque jamais que la peine d’apprendre, & très-rarement le beſoin de penſer. S’ils n’ont cependant rien perfectionné, non plus que les animaux en qui on remarque le plus d’adreſſe, c’eſt peut-être que ces peuples, n’ayant que des idées relatives aux premiers beſoins, l’égalité qui règne entre eux met chaque ſauvage dans la néceſſité de les acquérir, & de paſſer toute la vie à faire ſon cours de connoiſſances uſuelles : d’où il réſulte que la ſomme des idées de chaque ſociété des ſauvages n’eſt pas plus grande que la ſomme des idées de chaque individu.

Au lieu de méditations profondes, les ſauvages ont des chanſons. Leur chant, dit-on, eſt monotone. Mais ceux qui l’ont jugé tel, avoient-ils une oreille propre & faite à les bien entendre ? La première fois qu’on parle devant nous une langue étrangère, tout nous y paroît continu, dit & prononcé du même ton, ſans aucune inflexion, ſans proſodie. On ne commence à diſtinguer les mots,