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À Élie Reclus


Plantation Fortier, près de la Nouvelle-Orléans. Sans date. 1855.

Que deviens-tu mon brave ? Depuis de longs mois, je n’en sais absolument rien. La dernière lettre que j’ai reçue de toi te laissait à Paris, auprès de l’ami Hickel, faisant de la photographie et du mysticisme. Depuis, une phrase d’une lettre de ma mère m’a fait supposer que tu étais retourné en Angleterre, mais cette supposition ne me suffit pas. Où es-tu ? À Paris, à Berlin, à Londres, à Genève, à New-York, je n’en sais absolument rien et tant que je serai dans l’incertitude à ton sujet et à celui de Noémi[1], je le serai au mien propre. Ne sachant nullement ce que tu fais, je ne sais moi-même que faire. Écris donc, non pas une lettre, car la poste américaine fait métier de perdre les lettres, mais deux, trois, quatre, jusqu’à ce qu’enfin je sache par quel trou tu es passé.

Mon genre de vie est toujours à peu près le même. Papa Fortier m’a prié de rester encore une année dans sa famille aux mêmes conditions que par le passé, et moi je n’ai accepté que sous la supposition qu’il ne me

  1. Noémi, cousine des Reclus, qu’Élie devait bientôt épouser.