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À Élie Reclus.


Nouvelle-Grenade. Deuxième lettre, 5 mai 1856.
Frère Élie,

Je t’envoie la première lettre en même temps que celle-ci pour ne pas faire l’hypocrite avec toi et pour que tu puisses mieux juger les deux côtés de la question. Mais, aujourd’hui que je connais Sainte-Marthe à fond, je vois que ce serait une véritable trahison de te faire venir ici avec Noémi. Certainement, ce pays est le plus beau que j’aie encore vu sous la calotte du ciel, certainement il est facile de venir ici, et tu ne courrais aucun risque de mourir de faim si tu venais t’y établir, mais ce n’est pas tout que d’avoir des bananes et de contempler de belles montagnes, il faut encore avoir une certaine liberté d’action qu’il nous serait absolument impossible de conquérir.

Notre seule et unique ressource serait le jardinage et, certes, j’ai été singulièrement tenté de me reposer à l’ombre de mes bananiers et de ma vigne