Page:Reclus - Correspondance, tome 1.djvu/161

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que toutes les forces de l’air et de l’eau, de la matière et de la science ne travaillent pas de concert pour nous rapprocher sur cette petite pelote terrestre ?

J’ai été sur le point de vous demander quelques sous pour aller en France, mais la raison qui m’aurait fait partir n’existe plus. Le vieux Chassaigne me boudait à propos de quelques niaiseries. Ordinairement, dans une association, les dissentiments sont causés par les femmes et, à défaut de femmes, par les moutards, c’est ce qui nous est arrivé. Le pauvre vieux était jaloux d’un mulâtre qui travaille avec nous et auquel je donne des leçons de français : il a voulu l’expulser de l’association, mais quand il a vu que je ne m’y prêtais pas, il a parlé de rupture. Tu penses bien que j’ai accepté la chose très froidement et déjà je regardais la France. Quand le brave homme m’a vu si calme, il a changé de langage, il m’a supplié par tous les dieux de l’Olympe de vouloir bien rester et lui-même s’est mis à faire l’éloge de notre associé. Je suis resté parce que je me sens des devoirs envers Chassaigne, vieux, ennuyé, boudeur, et parce que l’association ne doit pas se briser par la faute d’un ci-devant socialiste.

Élisée.