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GÉOGRAPHIE.


IX. DU RHÔNE À L’ITALIE


1o De la Camargue aux Maures. — Après les vases, les sables, les branches de fleuve de la Camargue, on ne trouve pas d’étangs littoraux ouverts à la Méditerranée par des graux et des afoux. Il y en eut, il n’y en a plus depuis que les eaux marines appelées à présent étang de la Valduc, étang de Langrenier et autres plus petits, ont été définitivement sevrées de la mer pour devenir d’humbles lacs très salés, inférieurs de 8 à 9 mètres à son niveau. Bientôt, les rochers commencent, rochers âpres, côte soleilleuse, espalier, serre-chaude, ville d’hiver, lieu de guérison, de convalescence où d’agonie plus douce et moins prématurée.

Un chenal, qu’on pourrait approfondir, joint Bouc, port de mer, à la « Venise provençale », à Martigues, bâtie sur des îlots à l’entrée de l’étang de Berre. Ce chenal, tout le long duquel il y a des bordigues, c’est-à-dire des pêcheries, a nom chenal de Bouc ou étang de Caronte.

L’étang de Berre ; lac amer de 20 000 hectares, est séparé des flots par les monts de l’Estaque. Bordé de salines, il a 72 kilomètres de tour, 22 de long, 6 à 14 de large. Dès qu’on aura mis le chenal de Bouc en état de recevoir les grands navires, cette conque où se mirent des coteaux couverts d’amandiers, d’oliviers, de vignes, vaudra la rade de Brest : de ses 20 000 hectares, plus du quart, 5 600, peuvent recevoir les plus lourds vaisseaux, par des fonds de 7 à 40 mètres. Toutefois sa profondeur diminue peu à peu, par les limons des canaux de la Durance, et aussi par les débris qu’amènent la Touloubre et l’Arc.

La Touloubre, qui n’a pas 70 kilomètres, naît dans des monts nus, ravinés, brûlés, et passe près de Salon ; elle verse quelquefois un tribut de fleuve à l’étang de Berre, et plus souvent à peine un tribut de ruisseau.