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iv
INTRODUCTION

Et des petits jouent les grands follies,
Sur eschaffaux, en parolles polies,
Qui est permis par les princes et roys,
A cette fin qu’ils sçachent les derroys
De leur conseil, qu’on ne leur ause dire,
Desquelz ils sont advertis par satire.
Le roy Loys douziesme desiroit
Qu’on les jouast a Paris, et disoit
Que par tels jeux il sçavoit maintes faultes
Qu’on luy celoit par surprinses trop caultes[1].

Au point de vue de la forme, la sottie se rattache à ces fatras ou fatrasies dont le moyen âge nous a légué de nombreux exemples[2] ; c’est une série de traits et de mots disparates qui n’ont d’autre liaison entre eux que la rime. L’extrême diversité des vers qui se suivent, le brusque passage d’une idée à une autre, l’amoncellement des proverbes et des allusions satiriques sont les principaux mérites du genre. La fatrasie donna naissance à deux espèces de sotties : l’une destinée à être récitée dans des concours de rhétorique, l’autre, au contraire, ayant un caractère dramatique.

  1. Epistres morales et familières du Traverseur (Poitiers, 1545, in-fol.), I, fol. 32 d. — Quant à la tolérance attribuée au roi Louis XII, nous en avons la preuve dans plusieurs pièces dramatiques, surtout dans la Sottie de l’Astrologue, qui est de 1498 (ci-après, p. 195, no VII), puis dans la moralité du Nouveau Monde, composée en 1508, probablement par André de La Vigne (voy. Bull.  de la Soc. du Protestantisme français, t. XXXVI, 1887, 182), dans le Monologue du pelerin passant, écrit par Pierre Tasserye vers 1509 (voy. notre travail sur le Monologue dramatique, inséré dans la Romania, en 1886-1888, article 81), enfin dans la Sotise que nous attribuons à André de La Vigne (ci-après, no XII). Cf. Brantôme, éd. Lalanne, t. VII, p. 316.
  2. Voy. notamment Jubinal, Nouveau Recueil de Contes, Dits, Fabliaux et autres pièces inédites, II, p. 208. — Cf. E. Langlois, Recueil d’arts de seconde rhétorique. 1903, p. 192 et passim.