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CHAPITRE QUINZIÈME

Emmanuel et de nommer ensuite pour régente la reine elle-même, ou pour régent du royaume soit le duc de Gênes, soit le prince de Carignan, auxquels on supposait peu de sympathie pour le Statuto. Le premier acte de cette régence aurait été de rétablir l’ancien ordre des choses, en s’appuyant au besoin sur l’armée autrichienne qui, à un signal donné, aurait envahi et occupé le Piémont.

M. de Butenval ayant été rappelé en France par la mort de son père, je faisais alors l’intérim. J’assistai à un bal donné au théâtre royal au profit des pauvres. Lorsque le roi parut dans la salle, des démonstrations d’enthousiasme éclatèrent sur tous les points. Le public protestait ainsi contre les intrigues qu’il croyait avoir été ourdies contre la personne de Victor-Emmanuel. Un inconnu, qui était à peu de distance de moi, s’écria en désignant le prince de Carignan qui était dans la grande loge royale : « È venuto ancora questa sera per far figura, ma domani sarà a Fenestrelle. » (Il est venu ce soir encore pour faire figure, mais demain il sera à Fenestrelle.)

Cette prétendue conspiration, à laquelle il paraissait impossible que des gens sensés eussent pu croire un seul instant, avait donc été admise par la crédulité populaire. Ce qui pouvait à la rigueur expliquer la facilité avec laquelle cet invraisemblable roman