Page:René Crevel La Mort Difficile 1926 Simon Kra Editeur.djvu/83

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acharnée. Nuits calmes après des jours sans peur. Un corps frais et docile tout contre le sien lui vaudrait un sommeil sans cauchemars dans un large lit. Même au milieu de ses rêves, il ne se rappellerait point ses promenades solitaires qu’il poursuit jusqu’à l’aube dans les rues d’une ville où les passants ont retrouvé leurs yeux de fauve.

Bruggle serait oublié et ses caprices irrésistibles et les aventures où sans cesse il entraîne Pierre, comme pour le plaisir de l’imaginer le lendemain, ravagé d’alcool, de dégoût et de peur. Diane à côté de Pierre et tous les maux et les tristesses de son existence seront chassés de sa mémoire. Il serait heureux et d’un tel bonheur qu’il ne se sentirait plus lui-même. Mais déjà Pierre ricane. Diane met sa fourrure. Il l’accompagne jusqu’à sa porte, la laisse partir sans un mot. Elle et lui ? Leur bonheur ? Allons donc. Un chant d’amour qui vaudrait ni plus ni mieux que le ronron de l’eau qu’on met à chauffer pour le thé.

Si Pierre aimait moins Diane, sans doute accepterait-il d’en faire sa garde-malade, quitte à la renvoyer une fois guéri. Diane alors pourrait se rappeler que le suicide c’est comme les cheveux poil-de-carotte. Les cheveux poil-de-carotte, les suicides dans la famille Blok ? Pierre prévoit la mort de Diane, l’accepte, en décide. Serait-il donc devenu fou et non seulement fou, mais odieux, criminel, et, Mme  Dumont-Dufour