Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/289

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un présent capable de le toucher, un beau morceau de viande, de la bonne graisse, une coupe de soma ou de vin. Les fléaux, les maladies étant considérés comme les coups d’un dieu irrité, on s’imagina qu’en substituant une autre personne aux personnes menacées, on détournerait le courroux de l’être supérieur ; peut-être même, se disait-on, le dieu se contentera-t-il d’un animal, si la bête est bonne, utile et innocente. On jugeait le dieu sur le patron de l’homme, et de même qu’aujourd’hui encore, dans certaines parties de l’Orient et de l’Afrique, l’indigène croit gagner la faveur d’un étranger en tuant à ses pieds un mouton, dont le sang coule sur ses bottes et dont la chair servira ensuite à sa nourriture, de même on supposait que l’être surnaturel devait être sensible à l’offrande d’un objet, surtout si par cette offrande l’auteur du sacrifice se privait de quelque chose. Jusqu’à la grande transformation du prophétisme au VIIIe siècle avant J.-C, l’idée des sacrifices ne fut pas chez les Israélites beaucoup plus relevée que chez les autres peuples. Une ère nouvelle commence avec Isaïe, s’écriant au nom de Jéhovah : « Vos sacrifices me dégoûtent ; que m’importent vos chèvres et vos boucs[1]! » Le jour où il écrivit cette page

  1. Isaïe. ch. i.