Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/113

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

celle de la Thora[1]. Le talmudisme et le christianisme devenaient ainsi les deux antipodes du monde moral ; la haine entre eux croissait de jour en jour. Le dégoût qu’inspiraient aux chrétiens les recherches subtiles de la casuistique de Iabné s’est écrit dans les Évangiles en traits de feu.

L’inconvénient des études talmudiques était la confiance qu’elles donnaient, le dédain qu’elles inspiraient pour le profane : « Je te remercie, Éternel, mon Dieu, disait l’étudiant en sortant de la maison d’étude, de ce que, par ta grâce, j’ai fréquenté l’école au lieu de faire comme ceux qui traînent dans les bazars. Je me lève comme eux ; mais c’est pour l’étude de la Loi, non pour des motifs frivoles. Je me donne de la peine comme eux ; mais j’en serai récompensé. Nous courons également ; mais moi, j’ai pour but la vie future, tandis qu’eux ils n’arriveront qu’à la fosse de la destruction[2]. » Voilà ce qui blessait si fort Jésus et les rédacteurs des Évangiles, voilà ce qui leur inspirait ces belles sentences : « Ne jugez pas, et vous ne serez point jugé », ces paraboles où l’homme simple, plein de cœur, est préféré au docteur orgueilleux[3]. Comme saint Paul, ils voyaient dans les ca-

  1. Derenbourg, op. cit., p. 350-352.
  2. Talm. de Bab., Berakoth, 28 b.
  3. Luc, xviii, 9 et suiv.