Page:Renan - L’Avenir de la science, pensées de 1848.djvu/511

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

majorité de ceux qui le professent, n’est plus le catholicisme c’est la religion. Il répugne de passer sa vie comme la brute, de naître, de contracter mariage, de mourir sans que quelque cérémonie religieuse vienne consacrer ces actes saints. Le catholicisme est là, satisfaisant à ce besoin ; passe pour le catholicisme. On n’y regarde pas de plus près ; on n’entre pas dans le détail des dogmes, on plaint ceux qui s’imposent ce labeur ingrat, on est cent fois hérétique sans s’en douter. Ce qui a fait la fortune du catholicisme de nos jours, c’est qu’on le connaît très peu. On ne le voit que par certains dehors imposants, on ne considère que ce qu’il a dans ses dogmes d’élevé et de moral, on n’entre pas dans les broussailles ; il y a plus, on rejette bravement ou on explique complaisamment ceux de ses dogmes qui contredisent trop ouvertement l’esprit moderne. S’il fallait faire en particulier un acte de foi sur chaque verset de l’Écriture ou sur chaque décret du Concile de Trente, ce serait bien autre chose ; on serait surpris de se trouver incrédule. Ceux que des circonstances particulières ont amenés à soutenir sur ce terrain un duel à la vie à la mort, ont des raisons pour n’être pas si commodes.

Telle est donc l’explication de ce retour au catholicisme, qui a l’air d’être une si forte objection contre la philosophie. Le xviiie siècle, ayant eu pour mission de détruire, y trouvait le plaisir que tout être rencontre à accomplir sa fin. Le scepticisme et l’impiété lui plaisaient pour eux-mêmes. Mais nous qui ne sommes plus enivrés de cette joie du premier emportement, nous qui, revenus à l’âme, y avons trouvé l’éternel besoin de religion, qui est au fond de la nature humaine, nous avons cherché autour de nous, et, plutôt que de rester dans cette pénurie devenue