Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/260

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ne fait que signer. Les inspecteurs, les membres du conseil n’ont aucune influence. Ah ! si nous étions au temps de M. Villemain ou de M. Cousin, me disait-on, à la bonne heure !… Tout cela m’attristait profondément — Cependant toutes les personnes vraiment éclairées et comprenant la science me conseillaient de rester à Paris à tout prix, et mieux que personne j’en voyais l’absolue nécessité. Mes thèses ne peuvent s’achever qu’à Paris ; leur succès peut décider de tout mon avenir. Avec le titre de docteur, l’École Normale peut s’ouvrir ; je suis presque assuré d’une suppléance de Faculté en province ; je me place au moins dans un rang distingué et tout à fait à part. Enfin, excellente amie, après bien des hésitations, il fut décidé que je resterais. — je vis M. Soulice. Avec les meilleures intentions du monde, je dois dire qu’il me leurra un peu. Il me détourna d’adresser une demande directe pour rester à Paris, et obtenir une suppléance : il me promit de tout faire par lui-même. J’obéis, et ce fut une grande faute. Soit qu’il n’ait pas exercé toute l’influence qu’il aurait souhaitée dans une affaire qui n’était pas de son ressort immédiat, soit toute autre cause, il s’ensuivit un incident fort désagréable. Mon nom tomba dans la machine administrative : il fallait me placer, on m’appliqua au premier vide qui se présenta, et je fus nommé professeur de philosophie au lycée de Vendôme. Vendôme, lycée de troisième classe érigé depuis un an seulement à la place de l’ancienne institution de plein exercice, avec deux