Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/173

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prophétique de plusieurs des enseignements de l’Iran avait beaucoup d’analogie avec certaines compositions d’Osée et d’Isaïe. Israël se reposa sous les Achéménides[1], et, sous Xerxès (Assuérus), se fit, dit-on, redouter des Iraniens eux-mêmes. Puis l’entrée triomphante et souvent brutale de la civilisation grecque et romaine en Asie le rejeta dans les rêves. Plus que jamais, il invoqua le Messie comme juge et vengeur des peuples. Il lui fallut un renouvellement complet, une révolution prenant la terre à ses racines et l’ébranlant de fond en comble, pour satisfaire l’énorme besoin de vengeance qu’excitaient chez lui le sentiment de sa supériorité et la vue de ses humiliations[2].

Si Israël avait eu la doctrine, dite spiritualiste, qui coupe l’homme en deux parts, le corps et l’âme, et trouve tout naturel que, pendant que le corps pourrit, l’âme survive, cet accès de rage et d’énergique protestation n’aurait pas eu sa raison d’être. Mais une telle doctrine, sortie de la philosophie grecque, n’était

  1. Tout le livre d’Esther respire un grand attachement à cette dynastie. L’Ecclésiaste, qui paraît avoir été écrit vers la même époque, montre dans les idées juives un singulier relâchement.
  2. Lettre apocr. de Baruch, dans Fabricius. Cod. pseud. V. T., II, p. 147 et suiv., et dans Ceriani, Monum. sacra et prof., I, fasc. i, p. 96 et suiv.