Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/372

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teté[1]. Une chronologie assez lâche présidait à ces combinaisons, fondées pour la plupart sur des faits réels travestis[2]. Mais un singulier esprit de douceur et de bonté, un sentiment profondément populaire, pénétraient toutes ces fables, et en faisaient un supplément de la prédication[3]. C’est surtout après la mort de Jésus que de tels récits prirent de grands développements ; on peut croire cependant qu’ils circulaient déjà de son vivant, sans rencontrer autre chose qu’une pieuse crédulité et une naïve admiration.

Que jamais Jésus n’ait songé à se faire passer pour une incarnation de Dieu lui-même, c’est ce dont on ne saurait douter. Une telle idée était profondément étrangère à l’esprit juif ; il n’y en a nulle trace dans les Évangiles synoptiques[4] ; on ne la trouve indiquée que dans les parties du quatrième Évangile qui peuvent le moins être acceptées comme un écho de la pensée de Jésus. Parfois Jésus semble prendre des précautions pour repousser une telle

  1. Luc, ii, 25 et suiv. (faible autorité).
  2. Ainsi la légende du massacre des Innocents se rapporte probablement à quelque cruauté exercée par Hérode du côté de Bethléhem. Comp. Jos., Ant., XIV, ix, 4 ; B. J., I, xxxiii, 6.
  3. Matth., i et ii ; Luc, i et ii ; S. Justin, Dial. cum Tryph., 78, 106 ; Protévang. de Jacques (apocr.), 12 et suiv.
  4. Certains passages, comme Act., ii, 22, l’excluent formellement.