Page:Reval - La cruche cassee.djvu/20

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grande sœur, qui du même coup, voit son chignon défait.

— Tu embrasses trop fougueusement, Suzie, tu vas comme la tempête !

— Dis donc, reprend la gamine, le docteur Vimart nous dira les noms des fleurs en latin.

— Oui, il nous indiquera aussi les noms en patois ; dans ce pays-ci, il y a des noms de fleurs qui sont si jolis !

— C’est vrai. Tiens, le Térence, qui voulait nous tirer la bonne aventure, m’a dit l’autre jour en parlant de toi, qu’avec tes yeux bleus et ta chevelure blonde, tu ressemblais à cette fleur des blés qu’on appelle : les cheveux de Vénus ! Moi, il m’a dit que j’avais des yeux violets comme la fleur de la Passion ! Tu connais cette fleur-là ?

— C’est, je crois, une clématite très large et très sombre, une fleur triste.

— Alors il est fou, le Térence ?

— Non, c’est une façon de poète, répond la jeune fille, en reprenant une à une les brindilles de muguet, qu’elle serre en touffe, pour les envelopper ensuite d’une collerette de feuillage.

— Dis, grande sœur, interroge Suzie après quelques instants de silence, n’aimes-tu pas mieux être à Gondreville qu’à Chaumont ? il fait bon ici, on est libre !

— Il fait bon, opine distraitement l’aînée.

— Oh ! moi, je suis si contente ! on joue, on court, on sort sans chapeau, sans gants. Papa m’a promis de m’emmener à la chasse : c’est moi qui tirerai la ficelle du miroir, quand on ira chasser les alouettes,