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REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

Enfin M. Russell, aux trois axiomes précédents, qu’il considère comme a priori, en adjoint un quatrième qui à ses yeux a un caractère empirique : « L’espace a trois dimensions » ; d’après lui, tout ce que nous pouvions affirmer a priori c’est que le nombre des dimensions est fini et entier.

En résumé, il est nécessaire de compléter la liste des axiomes, et de modifier les énoncés en remplaçant les expressions un peu vagues et ambiguës de M. Russell par d’autres plus précises. On arrive ainsi à la liste suivante :

1o L’espace est une multiplicité (variété, Mannigfaltigkeit, manifold) continue à trois dimensions.

2o Les points de cette multiplicité, tant à distance finie qu’à distance infinie, sont qualitativement indiscernables les uns des autres.

3o Par deux points passe une droite, et une seule.

4o Par trois points, non en ligne droite, passe un plan, et un seul, qui contient les droites qui joignent ces trois points deux à deux.

5o Un plan et une droite se rencontrent toujours.

De cette liste on ne peut rien retrancher.

§ 4.

Passons à la seconde question ; nous rencontrerons là des difficultés plus sérieuses. M. Russell commence par établir qu’aucune expérience ne serait possible sans une forme d’extériorité ; que cette forme doit se réduire à un ensemble de relations ; que cette forme doit être parfaitement homogène. Sur tous ces points nous sommes d’accord.

Ensuite M. Russell cherche à démontrer que cette forme ne saurait être homogène sans être continue et divisible à l’infini. Ici je ne comprends pas le premier mot de son raisonnement, mais je puis néanmoins lui accorder, non certes que toute forme homogène doit être continue, mais que l’existence d’une forme d’extériorité continue peut être la condition indispensable de certains genres d’expérience.

Je ne chicanerai pas non plus sur le nombre des dimensions ; mais voici où la difficulté commence entre deux points quelconques il doit y avoir une relation, cela est évident. Mais pourquoi cette relation est-elle une ligne, c’est-à-dire un ensemble d’autres points ? Cela paraît d’abord dénué de sens ; mais en y réfléchissant on peut arriver à comprendre : M. Russell a probablement voulu dire que