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Or, quelle qu’ait été la diversité originelle de ses éléments constitutifs, un tout homogène est toujours indéfiniment divisible en parties intégrantes semblables entre elles et semblables au tout. Si loin que pénètre la division, elle ne trouve pas l’indivisible. La chimie cherche vainement l’atome, qui recule à l’infini. L’homogénéité exelut donc l’individualité ; elle exclut l’unité véritable, et par conséquent le véritable être. Dans un tout homogène il y a de l’être, sans doute, mais il n’y a pas un être.

En toute synthèse homogène, il n’y a qu’une existence indéfiniment divisible et multiple, sous l’empire de forces diffuses, où le fait semble se confondre avec la loi, et la loi avec la cause dans l’uniformité d’une nécessité générale. Il n’y a point là de substance déterminée et d’énergie individuelle où la puissance réside, et où puisse s’établir et se conserver une habitude.

L’habitude n’est done pas possible dans cet empire de l’immédiation et de l’homogénéité qui forme le règne inorganique.

II. Dès que le changement qui opère la synthèse dans la nature n’est plus une réunion ou une combinaison immédiate, dès qu’il y a un temps mesurable entre la fin et le principe, la synthèse n’est plus homogène. Comme il faut, pour y arriver, une suite d’intermédiaires dans le temps, de même il faut dans l’espace un ensemble de moyens, il faut des instruments, des organes. Cette unité hétérogène dans l’espace, c’est l’Organisation. Cette unité successive dans le temps, c’est la Vie ; or, avec la succession et l’hétérogénéité, l’individualité commence. Un tout hétérogène ne se divise plus en parties semblables entre elles et semblables au tout. Ce n’est plus seulement de l’être, c’est un être.

C’est donc, à ce qu’il semble, un seul et même sujet, une substance déterminée qui développe, sous des formes et à des époques diverses, sa puissance intérieure. Ici paraissent réunies à la fois, du même coup, toutes les conditions de l’habitude.

Avec la vie, commence l’individualité. Le caractère général de la vie, c’est donc qu’au milieu du monde elle forme un monde à part, un et indivisible. Les choses inorganisées, les corps, sont livrés sans réserve et immédiatement soumis aux influences du dehors, qui font leur existence même. Ce sont des existences tout extérieures, assujetties aux lois générales d’une nécessité commune. Au contraire, tout être vivant a sa destinée propre, son essence particulière, sa