Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 3.djvu/185

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
177
SOUVENIRS DES CÔTES D’AFRIQUE.

médite une ruse. Il dit à son hôte : « Pardieu, capitaine, vous êtes un aimable homme ; je suis charmé d’avoir fait votre connaissance ; il faut que je vous donne un conseil d’ami : la station française rôde dans les environs ; les lois de France sont sévères ; je serais fâché que vous fussiez pris : j’appareille ce soir, levez l’ancre demain à la marée descendante, et faites même route que moi, à vingt-quatre heures de distance ; les bâtimens de guerre français ne viendront pas vous chercher dans les eaux d’un bâtiment de guerre anglais. » Le Français remercie du conseil, promet de le suivre, et après bien des complimens ces messieurs se quittent enchantés l’un de l’autre. L’Anglais appareille ; le Français passe la nuit et une partie de la journée du lendemain à charger ses provisions et embarquer ses noirs ; il profite d’une brise de terre et de la marée descendante pour lever l’ancre à l’heure convenue. Après avoir doublé une pointe, et à l’embouchure de la rivière, on aperçoit un bâtiment : nul moyen de faire retraite ; on ne peut remonter le courant : la marée descend, et la brise vient de terre ; le navire est droit sur la route, et à demi-portée de canon : la pointe que l’on vient de doubler a empêché de le voir plus tôt. Il tire un coup ; on n’a pas de canons pour lui répondre, il faut amener le pavillon ; bientôt on reconnaît dans le navire capteur le bâtiment de guerre commandé par le capitaine anglais qui a donné un si bon conseil ; mais ce capitaine a changé de langage ; la veille, le