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LA MORT DU DUC DE REICHSTADT.

crins mal faits ; c’est la révolte à main armée ; ce sont les luttes des partis qui se tiraillent. — Bonaparte ne savait pas ce que c’était qu’un parti, Bonaparte ! Ton grand-père à toi, Henri, aurait pu te le dire, s’il l’avait voulu ; mais il aurait rougi de te l’avouer, l’inflexible vieillard ! Il n’y a eu que Louis xiv mourant, dans toute la maison de Bourbon, qui ait donné une leçon de sagesse à son fils.

Ne trouvez-vous pas déjà que notre roman se poétise ? Ne trouvez-vous pas que c’est en effet un étonnement digne de remarque que l’étonnement de ces deux jeunes princes qui arrivent en France et qui y cherchent deux choses qui, au premier abord, doivent y être nécessairement, l’une ou l’autre ? celui-ci l’Empire, la gloire, les armes, que sais-je ? celui-là, le trône légitime, la religion catholique, le passé, que sais-je ? Or ni l’un ni l’autre, l’un dans cette France qu’a faite son père, l’autre dans cette France qu’a refaite son grand-père ; ni l’un, ni l’autre, dis-je, ne trouvent ce qu’ils viennent y chercher. Désespoir !

— Mais enfin qu’y a-t-il donc dans cette France, diront-ils ? Qu’avez-vous fait de la gloire de mon père, du despotisme de mon père ? dira Bonaparte. — Qu’avez-vous fait de la croyance et du despotisme de mes pères ? dira Bordeaux. Alors un vieux soldat viendra qui dira : — Tout cela est perdu, sire ! — Un jeune prêtre viendra qui dira : — On ne croit plus à rien, votre Majesté ! — Le vieux soldat se fera garde-chasse dans les forêts de Louis-Philippe ; le jeune prêtre ira se marier à l’autel qu’il a desservi, et tout sera dit pour les deux voyageurs.

Vous les plaignez peut-être ; moi, je ne les plains pas. Laissez-leur faire leur éducation tout seuls. Il faudra que cette éducation soit rude pour être à la hauteur de leurs besoins. Si je plains quelqu’un en ceci, c’est la France qui n’a rien gardé ni de cette gloire, ni de cette croyance, qui ne peut pas représenter le moindre échantillon de son double passé, qui a autant oublié Bonaparte qu’elle a oublié Charles x. Soyez donc protecteur de la confédération du Rhin, ou faites-vous sacrer à Reims après cela !

Bonaparte ! et vous me demandez où en est la poésie en