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LES CAPRICES DE MARIANNE.

chanter sous vos fenêtres ? N’avez-vous jamais soulevé, à minuit, cette jalousie et ce rideau ?

MARIANNE.

Tout le monde peut chanter le soir, et cette place appartient à tout le monde.

OCTAVE.

Tout le monde aussi peut vous aimer ; mais personne ne peut vous le dire. Quel âge avez-vous, Marianne ?

MARIANNE.

Voilà une jolie question, et si je n’avais dix-neuf ans, que voudriez-vous que j’en pense.

OCTAVE.

Vous avez donc encor cinq ou six ans pour être aimée, huit ou dix pour aimer vous-même, et le reste pour prier Dieu.

MARIANNE.

Vraiment ? Eh bien ! pour mettre le temps à profit, j’aime Claudio, votre cousin et mon mari.

OCTAVE.

Mon cousin et votre mari ne feront jamais à eux deux qu’un pédant de village ; vous n’aimez point Claudio.

MARIANNE.

Ni Cœlio ; vous pouvez le lui dire.

OCTAVE.

Pourquoi ?

MARIANNE.

Pourquoi n’aimerais-je pas Claudio ? c’est mon mari.

OCTAVE.

Pourquoi n’aimeriez-vous pas Cœlio ? c’est votre amant.

MARIANNE.

Me direz-vous aussi pourquoi je vous écoute ? Adieu, seigneur Octave ; voilà une plaisanterie qui a duré assez long-temps.

(Elle sort.)
OCTAVE.

Ma foi, ma foi ! elle a de beaux yeux. (Il sort.)