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ânes ni poules. Les armes dans les mains des soldats servent à la défense et à la sûreté de l’état ; mettez-les dans les mains du peuple, qu’en advient-il ? des insultes, des rixes, des meurtres. Terminez la lecture.

Le Docteur. — « Surtout si vous voulez assurer le repos de vos peuples, raffermir vos trônes, et remédier aux désordres du monde, ramenez le respect pour la religion, qui, méprisée et repoussée de tous, ne trouve aujourd’hui aucun asile sûr, pas même dans les temples. Les ministres des autels sont devenus la balayure du peuple, et leur nom même sert vulgairement à désigner toutes les folies et toutes les turpitudes[1]… Cette haine et ce mépris de la religion sont l’œuvre de la révolution alliée à l’impiété, et vous savez que les coups portés à la religion ont ébranlé vos trônes et les menacent de ruine. Qu’avez-vous fait cependant pour rétablir dans le cœur des peuples cette protectrice des trônes ? Et où est le roi dont le zèle se soit enflammé pour la cause de Dieu. Vous êtes, princes, religieux et bons ; mais est-ce la religion et la bonté des rois qui gouvernent toujours les états ? N’arrive-t-il jamais que la religion commande dans le cœur des rois, et serve les intérêts et la politique dans les cabinets ? Posez la main sur la poitrine, jetez les yeux sur les annales de vos empires, et répondez-moi sincèrement. Quel est celui de vos royaumes où l’on ne puisse recueillir un volume d’édits et d’ordonnances royales opposés aux canons de l’église ? Quel est celui de vos palais où il ne se trouve point quelque salle ornée des dépouilles du sanctuaire ? Quel est celui de vos gouvernemens qui n’ait point fait verser quelque larme au pasteur du Vatican ? Tandis que la religion, frappée par les rois, tremblera devant leur trône, comment pourra-t-elle recouvrer son autorité sur le cœur des peuples ? et tandis que les peuples ne respecteront point le frein de la religion, comment pourront-ils se soumettre à l’empire des rois ? Princes, comprenez, pesez, espérez, alliez-vous de bonne foi avec le sacerdoce, et sans vous placer sous ses pieds, cédez-lui la main, parce que si vous êtes les premiers nés dans l’église, vous êtes aussi les enfans de l’église. D’accord avec cette mère sage, discrète et pieuse, employez la voix, l’exemple, l’a-

  1. E le azzioni pazze e degne di scherno si chiamano volgarmente frafate.