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riser l’agriculture, mais d’élever le prix du fermage des terres, au grand détriment de l’agriculture, et pour le seul bénéfice du propriétaire. L’exposition de 1834 nous a montré de belles et bonnes laines produites sur le sol français. Le nord de la France, c’est-à-dire les départemens qui avoisinent Paris, la Normandie, l’Artois, la Champagne, la Picardie, la Brie, la Beauce et l’Île de France possèdent presqu’exclusivement les moutons à laine fine et à toisons améliorées. Il n’existe guère qu’une exception dans le troupeau de Naz, département de l’Ain, vrai type de supériorité, et qui montre à cent vingt lieues de la capitale les résultats que peuvent obtenir des hommes judicieux et éclairés. Nous louerons surtout les propriétaires de ce que, seuls de tous les producteurs de laines, ils ont compris que l’intérêt de l’agriculture n’était pas de vendre sans concurrence aux fabricans d’étoffes, mais de voir les manufactures se développer et s’améliorer. Eux seuls ont combattu les mesures désastreuses contre lesquelles le gouvernement se débat à cette heure.

Pendant une longue période, les pays industrieux entraient assez volontiers dans la voie de prohiber ou d’entraver la sortie des laines, mais aucun ne songeait à repousser ou à frapper d’un droit celles qui arrivaient de l’étranger. On regardait comme précieuses toutes les matières premières, et on les exceptait soigneusement des prohibitions. L’Angleterre, sous les ministres tories dont le règne a duré un quart de siècle, a commencé, en 1805, à leur imposer un droit qui équivalait d’abord à 15 francs par 100 kilogrammes, et qui fut graduellement élevé jusqu’à 23 fr. 30 c. (un denier par livre), taux auquel il était encore en octobre 1819. La même influence, qui depuis a agi chez nous, amena un changement de système. Le droit fut porté, vers la fin de 1819, à 6 deniers par livre (139 fr. 80 c. pour 100 kilogrammes), et subsista ainsi jusque vers la fin de 1824, où l’on est enfin revenu au droit de un denier (23 fr. 30 c.) pour la laine dont la valeur dépasse un shilling la livre, et moitié de ce droit pour celle qui est au-dessous.

En France, la loi du 28 avril 1816 n’imposait les laines qu’à un simple droit de contrôle de 1 fr. par 100 kil. À la sortie, en revanche, on percevait 33 fr. sur les laines fines lavées, 16 fr. 50 c. sur les mêmes laines en suint, et on prohibait les laines communes. La production se développant dans toute l’Europe, les prix baissèrent dans une série de bonnes récoltes, et le système de prohibition étant réclamé par les grands propriétaires, on fixa le tarif des laines brutes ou en suint à 24 fr. 20 c. pour les surfines, 18 fr. 15 c. pour les fines, et 12 fr. 10 c. pour les communes ; le double quand elles étaient lavées à froid, et le triple quand elles étaient lavées à chaud. Un simple droit de balance fut mis à la sortie.