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REVUE DES DEUX MONDES.

avec les agens des clubs ; car elle y a fait enlever tout récemment, en une nuit, trente des meneurs les plus actifs de la populace (et non pas des jeunes gens carlistes, comme l’a prétendu un journal), mesure qui a prévenu un mouvement ultra-révolutionnaire préparé pour le lendemain. C’est Mina mourant qui traite avec si peu de façon la liberté individuelle des patriotes barcelonnais. Mais on craint une explosion : la populace y demande à grands cris la déposition du gouverneur civil, la dissolution des lanciers de la garde nationale, comme trop aristocrates, et celle d’une garde de police, qui, dans ces derniers temps, a maintenu l’ordre avec vigueur. Pendant que la vie de Mina n’est plus soutenue que par des moyens factices, l’intérim de la capitainerie-générale est exercé par le général Aldama, commandant en second de la principauté, et fort impopulaire à Barcelonne. Il est impossible de prévoir comment tout cela finira. On ne sait pas encore si la reine conservera la régence, que la constitution de 1812 lui refuse, et dont elle n’est restée nominalement en possession que par une tolérance dont la durée est incertaine.

Jusqu’ici le prétendant ne paraît pas en mesure de profiter de cette confusion, et ses troupes viennent d’essuyer deux graves échecs à quelques jours de distance, l’un en Navarre, l’autre sur les confins des royaumes de Valence et d’Aragon. Quant à Gomez, on ne sait ce qu’il est devenu : tandis que le général Espartero se vante de l’avoir exterminé, les carlistes publient qu’il est à la tête de 20,000 hommes, et qu’il occupe une partie de la Galice, les Asturies et le royaume de Léon.


REVUE MUSICALE.

L’Opéra n’est plus le théâtre prospère que nous avons connu. La seconde rentrée de Mlle Taglioni, dans la Révolte au sérail, avait attiré peu de monde, et la Juive s’est chantée devant un auditoire des moins nombreux et des plus indifférens. Voilà pour l’autre semaine. Quant à celle qui vient de s’écouler, elle a été notée par les plus tristes revers. On sait le fâcheux évènement survenu lundi pendant la représentation de Robert-le-Diable. Nous ne prétendons pas ici rendre M. Duponchel responsable d’un rideau qui tombe, ce serait absurde ; ce que nous en dirons est tout simplement pour déplorer l’espèce de fatalité qui semble depuis quelque temps s’attacher à ce théâtre. En effet, s’il se rencontre par hasard dans l’année une bonne et louable représentation d’un chef-d’œuvre, voilà qu’un rideau tombe du ciel tout exprès pour l’interrompre au beau milieu. En vérité, c’est avoir du malheur. Sous M. Véron, ce rideau-là serait tombé pendant une cavatine de M. Alexis Dupont, et n’aurait rien troublé que les fausses notes du chanteur ; mais M. Véron était un homme heureux. Le lendemain l’Académie royale a fait relâche. C’est un excellent moyen d’empêcher les représentations d’être interrompues que de n’en pas donner du tout. En cela M. Duponchel nous semble avoir parfaitement raisonné. Cependant nous doutons que sa fortune s’accommode long-temps d’une pareille logique. Voilà pourtant où l’Opéra en est réduit. Une indisposition de Mlle Taglioni l’oblige à ne pas ouvrir ses portes. On jouera la Syl-