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LETTRES SUR L’ÉGYPTE.

pas été plus épargnées que les autres. Le pacha a réduit le clergé égyptien à la portion congrue ; en politique habile, il a très bien senti que le mahométisme, comme toutes les autres religions, était aujourd’hui à l’état historique ; qu’il n’avait plus aucune influence sur le présent, et qu’il fallait tout au plus le conserver comme un antique. Or, chez les musulmans, et principalement chez les Turcs, le culte de l’antiquité est un sentiment très peu développé, et ils ne se font aucun scrupule de porter la main sur les plus anciens monumens, pour y prendre ce qui est à leur convenance. Mohammed-Ali n’en agit pas autrement à l’égard du mahométisme.

Vous remarquerez l’allocation pour la caravane des pélerins, et l’offrande aux mosquées de Médine et de la Mekke ; le pacha, qui a détruit tant de préjugés et d’usages religieux, a conservé celui-ci à cause de son utilité pratique. Ces voyages annuels établissent, en effet, une communication régulière entre deux pays séparés par des déserts, et appartenant au même maître, Mohammed-Ali ; ils attirent chaque année au Kaire, 12,000 pélerins-commerçans, et activent les échanges d’idées et de denrées entre toute la côte d’Afrique et la côte arabique de la mer Rouge.

Si l’on compare le chiffre des pensions aux harems à celui de la rétribution aux cheyks, on verra que le pacha donne à peu près autant à ses femmes qu’à ses prêtres, et range sur la même ligne le plaisir et la religion. C’est qu’en effet, dans la manière de sentir des Orientaux, le plaisir est une religion et les harems en sont les temples. Seulement on peut dire que la religion du plaisir y est encore à l’état d’individualisme et de privilége.

Le chiffre de la dépense du pacha paraît d’abord fort modeste, surtout pour un souverain absolu, et qui dispose de tout le revenu de l’Égypte ; mais, comparé à la liste civile du roi des Français, on trouve que celle-ci n’est que de 1/114 du budget de France, tandis que la dépense du pacha est de 1/62 du budget de l’Égypte.

L’allocation pour l’enseignement public paraîtra peut-être moins forte qu’on pouvait s’y attendre, d’autant plus que, dans les écoles du gouvernement, au lieu de payer une pension, les élèves reçoivent un traitement. On peut diviser les écoles en trois classes : 1o écoles spéciales, 2o écoles élémentaires du gouvernement, 3o écoles des mosquées. Il y a dans les premières 4,500 élèves[1] ; dans les secondes, 4,000 ; dans les troisièmes, 9,000. C’est un

  1. École polytechnique 
    600
    École des ingénieurs des mines 
    150
    École des ingénieurs des ponts-et-chaussées 
    50
    École d’artillerie 
    600
    École d’infanterie 
    500
    École de cavalerie 
    400
    École préparatoire 
    1,150
    École d’administration 
    50
    École de médecine 
    700
    École vétérinaire 
    350
    TOTAL 
    4,500