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UN MOT


SUR LA


POLÉMIQUE RELIGIEUSE.

Ceux qui spéculent si bruyamment aujourd’hui sur des croyances respectables avaient pris un autre ton depuis plusieurs années ; la polémique avait cédé à la poésie ; l’ancienne controverse s’était changée en élégie. Ce n’étaient partout, dans cette théologie amoureuse, que cathédrales, ogives parfumées, petits vers demi-profanes, demi-sacrés, qui s’insinuaient en murmurant au cœur des plus rebelles ; art mystique, qui pour plus de tolérance sanctifiait les sens ; légions d’anges tombés, relevés, qui toujours étaient là pour couvrir de leurs ailes indulgentes l’hérésie ou le péché. Le démon lui-même, toujours pleurant, rimait des vers mélancoliques, depuis qu’il avait pris la peau de l’agneau. Dans ce changement, il n’est pas de voltairien qui se ne fût senti gagné et appelé ; c’était non pas une trêve, mais une paix profonde. Tant de douceur, tant d’amour, une piété si compatissante ! où est l’ame qui n’en eût pas été touchée ? Les temps des prophètes étaient arrivés. Le loup dormait avec la brebis, c’est-à-dire, la philosophie avec l’orthodoxie ; les incrédules répétaient sur leur lyre les cantiques spirituels des croyans, et les croyans purifiaient par la rime le doute des incrédules. Que ces temps étaient beaux, mais qu’ils ont passé vite ! C’est au milieu de ce paradis ter-