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FEU BRESSIER.

le soignait pas, qu’il était plein d’orties, et qu’on lui faisait des reproches.

Cornélie et Paul restèrent fidèles à leurs jardins ; ils étaient séparés seulement par une ligne tracée sur le terrain. Sur cette ligne, les deux enfans plantèrent un noyau de pêche. Leur joie fut plus grande que je ne le saurais dire, quand ils virent le germe sortir de terre.

Mais bientôt finit la belle saison. M. Morsy avec sa famille reprit le chemin de la ville. En quittant la campagne, il fit une visite à Mme Seeburg, qui annonça qu’elle ne retournerait pas à la ville jusqu’à la fin de son deuil. M. Morsy la pria de ne pas se gêner pour se promener dans son jardin, dont il lui laissa la clé.

— Paul, cria Cornélie en passant sa petite tête par la portière de la voiture qui les emmenait, aie bien soin de notre pêcher.

Pendant l’hiver, la campagne de M. Morsy n’était gardée que par un vieux jardinier. Deux ou trois fois, pendant la mauvaise saison, il allait à la ville, soit pour porter des légumes, soit pour prendre les ordres de ses maîtres.

Un jour qu’il revenait, il dit à Paul : Paul, Mlle Lilie a demandé comment allait son pêcher, et si tu en avais bien soin.

— Et qu’est-ce que vous avez répondu, Jérôme ?

— J’ai dit que pour le pêcher, je ne savais pas s’il y avait un pêcher, mais que tu soignais tous les jours les deux jardins.

Lorsque vint le printemps, Jérôme alla encore à la ville et dit à Paul : — Paul, je vais voir Mlle Lilie. Que faut-il dire pour le pêcher ?

— Il faut dire qu’il va très bien. Savez-vous quand ils viendront ?

— Mais, à la fin de mai.

— Si tard !

Cette année se passa comme la précédente. C’était au tour de la famille Morsy d’être en deuil. Ils avaient perdu un vieil oncle qui demeurait avec eux depuis long-temps. Mme Seeburg parla, en causant avec Mme Morsy, de son embarras pour trouver un logement à la ville ; elle ne voulait pas rentrer dans la maison où était mort son mari.

— Mais, dit Mme Morsy, si vous preniez dans notre maison le logement de notre oncle ?

— Comment est-il ?

— Un peu petit, mais convenable pour vous avec votre Paul et une servante.

— Il n’y a pas de jardin ?