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LE MONDE GRÉCO-SLAVE.

et s’éloigna. Voyant qu’il n’était plus considéré que comme un rebelle appuyé par la Russie, Miloch, effrayé, envoya quelques mois après une députation à Stambol, pour se raccommoder avec le divan ; mais l’insurrection d’Ipsilanti et des Grecs étant survenue, les députés serbes furent emprisonnés comme suspects. Une nouvelle guerre était imminente, les knèzes s’y préparaient : Miloch toutefois insista pour qu’ils continuassent de payer chaque année au sultan l’impôt convenu, et même les dîmes aux spahis ; ils durent obéir.

Miloch poursuivit bientôt plus ouvertement le but qu’il s’était proposé, la centralisation du pouvoir. La tendance sociale des Serbes a toujours été de diviser leur pays en cantons fédérés sous de petits princes électifs ou héréditaires. La politique turque se garde bien, on peut le croire, de contrarier ce penchant. En 1821, le pacha Marochli promit à Marko Abdoula, knèze de Smederevo, et à Stephane Dobriniats, des bérats qui les établissaient chefs indépendans, chacun dans sa nahia. Les deux knèzes, saisis par les agens de Miloch, périrent sous leurs coups ; mais il ne put se débarrasser aussi aisément de rivaux plus puissans : l’ancienne ligue des hospodars se renoua pour sauver Milosav Ressavats, ami d’Abdoula, qui, par l’achat d’immenses vignobles sur la Morava, était devenu le plus riche propriétaire de la nation. Au lieu de renoncer à réaliser une centralisation monarchique impossible dans ce pays nécessairement divisé par tribus et par cantons, l’obor-knèze s’obstina à renouveler en les outrepassant les anciennes mesures de Tserni-George contre les hospodars. Il essaya de séparer les knèzes d’avec le peuple, et de se les attacher en introduisant la coutume de les solder lui-même, pour qu’ils ne dépendissent plus de la nation, mais de lui seul ; il eut soin aussi que le taux de la solde ne fût pas fixé, afin de pouvoir l’élever ou le diminuer selon le dévouement qu’on montrerait à sa personne. En dépit de ces mesures, il y eut en 1825 une nouvelle révolte ; Miloch exigeait beaucoup plus d’impôts que les Turcs, il prélevait le haratch jusque sur les enfans de deux jours. Indignées de ces vexations, les nahias de Smederevo, de Pojarevats et même de Kragouïevats, s’insurgèrent. L’obor-knèze leur opposa les nahias du sud : les deux partis, celui du nord sous Miloïé Povovitj, surnommé Djak, ou le diacre, et celui du sud sous Voutchitj, se livrèrent bataille à Oplentsa, près Topola. Djak fut vaincu, pris et fusillé avec cent vingt autres Serbes à Hassan-Palanka ; son armée, en capitulant, avait exigé, entre autres garanties, qu’un de ses chefs, Andreï, serait fait knèze de Topola. Miloch le jura ; quelques semaines après, il fit assassiner