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Andreï. Alors, craignant que tant d’insurrections successives ne produisissent un mauvais effet chez les peuples voisins, il envoya au divan de Constantinople des pièces où il essayait de prouver la rébellion de Djak contre le sultan ; puis il écrivit au gouverneur autrichien de Zemlin, pour lui apprendre que, grace à ses efforts, la route commerciale entre l’Autriche et le Bosphore, purgée de brigands, présentait enfin la plus entière sécurité.

Cependant il sentait le besoin de se réhabiliter aux yeux des siens par quelque manifestation plus sérieuse : dans ce but, il convoqua pour le mois de janvier 1827 une grande skoupchtina, où il eut soin de n’appeler que ses créatures. Il en réunit mille dans l’église de Kragouïevats, et son ministre Davidovitj, récemment arrivé en Serbie, lut un discours où l’obor-knèze tâchait de se justifier des meurtres de ses rivaux, répondait aux reproches qu’on ne lui ménageait pas sur sa soif insatiable d’impôts, et développait les avantages assurés au pays par le traité d’Akerman. Miloch finissait en priant la skoupchtina de demander au sultan pour lui-même le titre de prince héréditaire. Aussitôt l’assemblée souscrivit un acte solennel où elle jurait de ne plus obéir qu’à lui et à sa postérité. L’obor-knèze reconnaissant mit cet écrit sur sa tête et le baisa, puis embrassa les assistans les uns après les autres. « Ne craignez plus rien, leur disait-il, je suis l’enfant du peuple, je n’oublierai pas mon origine. » Les knèzes de l’opposition virent avec désespoir le succès qui accueillait la nouvelle démarche de Miloch. Décidés à chasser l’obor-knèze ou à mourir, ils tentèrent avec six mille combattans un coup de main sur Kragouïevats. L’obor-knèze dut s’enfuir ; mais Voutchitj, qui faisait taire sa haine contre Miloch pour soutenir le pouvoir central, livra aux insurgés un combat acharné, où ils perdirent près de cinq cents hommes. De son côté, le visir de Belgrad, pour appuyer Miloch, avait fait venir cinq mille Bosniaques, qui bloquèrent le quartier serbe de cette ville, et ne se retirèrent que quand la paix eut été rétablie. Miloch crut alors pouvoir calmer les mécontens, en publiant et jurant ce qu’il appela la constitution serbe. Ce curieux document de mœurs gréco-slaves déclarait tous les Serbes nobles et égaux. Chaque commune restait solidaire devant la justice des actions de ses enfans, devait restituer l’équivalent des vols commis sur ses terres, et livrer le coupable à la police. Le condamné pouvait en appeler du tribunal de sa nahia au tribunal suprême qui siégeait à Belgrad ou à Kragouïevats. La police des chemins était confiée aux boulouk-bachi, dont chacun avait sous lui douze mom-