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LA VIE ET LES ÉCRITS DE VANINI.

il parle déjà dans l’Amphithéâtre, et qu’il nomme Physico-Magique[1] ; il rappelle aussi un Traité d’Astronomie qu’il avait fait imprimer à Strasbourg, en caractères élégans[2]. S’il a jamais existé réellement, ce livre n’est point parvenu jusqu’à nous. Celui que nous possédons n’est nullement méprisable au point de vue scientifique ; c’est encore, il est vrai, la physique péripatéticienne, mais interprétée et développée selon son véritable esprit, et non plus à la manière des scolastiques. N’oublions pas que nous sommes ici avant Galilée, le créateur de la physique moderne, qui le premier en détermina la méthode, et lui donna pour règles l’expérience et le calcul. Galilée a été pour la physique ce qu’a été Descartes pour la métaphysique. Avant Descartes, tous les efforts pour sortir de la scolastique et arriver à la vraie philosophie moderne sont impuissans ; avant Galilée aussi, on cherche avec ardeur la vraie physique ; on ne l’a pas trouvée. Une foule d’essais ingénieux et hardis paraissent incessamment d’un bout à l’autre de l’Italie, et attestent au moins une fermentation puissante ; on étudie la nature un peu au hasard, mais avec liberté et avec passion, et, pour que la science se fasse, il ne manque plus qu’un homme de génie. Pour bien juger des hommes tels que Telesio, Cesalpini, Cardan, Pomponat, ce n’est pas avec les sobres génies du XVIIe siècle, avec Galilée, Descartes et Newton, qu’il les faut comparer, c’est avec leurs devanciers du moyen-âge. Les observations de détail s’accumulent, et les théories se préparent. Les hypothèses antiques dominent encore l’esprit humain, et l’idée même du calcul appliqué aux phénomènes fournis par l’expérience n’est pas encore née ; mais ces hypothèses même sont comme le passage nécessaire des ténèbres du moyen-âge à la lumière de la science moderne.

Vanini est, en physique comme dans tout le reste, de l’école d’Aristote et de Pomponat. Il traite ici les platoniciens à peu près comme il l’a déjà fait dans l’Amphithéâtre. Aristote est pour lui « le philosophe par excellence, le maître, le dictateur, le dieu de la philosophie ; » il l’appelle « le grand pontife de la sagesse ; » il invoque ses mânes et son divin génie ; il se vante d’être son nourrisson. Alexandre d’Aphrodisée est nommé aussi avec de grands éloges. Parmi les modernes et les contemporains, Vivès est traité avec dédain, Képler avec honneur. Vanini loue souvent ses compatriotes Scaliger, Fracastor, Cardan, et surtout Pomponat, qui ici, comme dans l’Amphi-

  1. Dial., 31.
  2. Typis elegantissimis. Dial., p. 252.