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LE PARTI LÉGITIMISTE ET LE JACOBITISME.

n’avait pas le pouvoir, et à cette époque n’a-t-il pas rallié à lui, parmi les royalistes, tous les hommes qui étaient sincèrement attachés aux libertés nationales, de même qu’il leur enlève aujourd’hui tous ceux qui aiment avec intelligence le bon gouvernement et le bon ordre ?

Lorsqu’on se donne la peine d’examiner un peu sa situation, on est donc plus porté à rire qu’à se fâcher des poses fanfaronnes que prend en ce moment le parti légitimiste. Comme acte politique, son voyage à Londres n’a abouti qu’à faire connaître à la France son personnel. Nous permettons à ce parti d’être fier de ce résultat. S’il n’est pas allé à Londres pour autre chose, il a réussi, et nous nous félicitons autant que lui de son succès ; mais il aurait pu demander à l’Angleterre des enseignemens qui lui eussent été plus utiles. L’Angleterre a eu, elle aussi, des légitimistes ; elle aussi, elle a eu des prétendans, elle en a eu trois générations. Ses prétendans et ses légitimistes lui ont donné de rudes inquiétudes, et elle en est enfin venue à bout Elle peut apprendre aux légitimistes de tous les temps et de tous les pays l’issue qui est réservée à leurs inutiles, quoique souvent funestes agitations. Si M. le comte de Chambord était allé à Windsor, en parcourant, dans les archives de Cumberland-Lodge, la volumineuse collection des Stuart-Papers, et en méditant sur les derniers restes de tant d’intrigues, qui ont été conservés comme pour servir de leçon à la postérité, il eût pu se dégoûter des tristes aventures où d’imprudens conseillers cherchent à l’engager.

Mais les légitimistes n’aiment pas à entendre parler de l’histoire d’Angleterre : ils sont comme tous les entêtés malheureux, qui s’en prennent de leurs échecs à ceux qui les en ont vainement avertis d’avance. L’histoire d’Angleterre semblait avoir prophétisé aux légitimistes leur propre histoire. Les clairvoyans les prévenaient en 1828 et en 1829 qu’ils travaillaient par leur obstination à refaire la révolution de 1688. Ils niaient alors avec une superbe incrédulité la similitude des situations ; croyez-vous que 1830 les ait désabusés ? Pas le moins du monde, monsieur ; ils vous diront aujourd’hui qu’il n’y a pas la moindre ressemblance entre la situation des jacobites et la position que la révolution de juillet leur a faite.

Eh bien ! ici, les légitimistes ont peut-être plus raison qu’ils ne le souhaitent ; non, quoique les légitimistes soient tombés comme les jacobites, quoique, pas plus que les jacobites, ils ne soient destinés à se relever, la situation où 1830 les a mis ne se peut pas comparer, grace à Dieu, à celle que les partisans des Stuarts conservèrent long-temps en Angleterre. C’est la logique du droit divin et du pouvoir