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LA CONTREFAÇON BELGE.

Nous venons de montrer la situation actuelle de la contrefaçon belge. Le spectacle de désordre que présente son marché intérieur, la diminution constante des profits qu’elle retire de son commerce avec l’étranger, nous font croire, comme nous l’avons dit déjà, qu’elle marche vers une crise prochaine. L’activité de sa fabrication a beau ne pas se ralentir au milieu des embarras qui croissent autour d’elle, il est évident qu’elle produit pour produire. Elle dérobe aux écrivains français le fruit de leurs labeurs ; elle ne permet pas à la librairie parisienne de reparaître sur les marchés qu’elle exploitait autrefois, et cependant elle se ruine elle-même. Si elle est destinée à éprouver bientôt une perturbation commerciale, les sociétés de librairie qu’elle a formées en recevront les premiers coups. Ce qui nous le fait croire, c’est que la plus prudente des trois, celle qui fait le plus d’affaires avec l’étranger et se compromet le moins possible sur l’arène de la concurrence intérieure, a graduellement resserré sa fabrication depuis quelques années[1]. Dans une autre, les actionnaires sont en querelle ouverte avec les directeurs et se voient forcés de réclamer judiciairement la stricte observation des statuts. Toutes ont renoncé à acquitter l’intérêt des capitaux qui ont servi à les constituer en 1836, et nous croyons qu’il n’y en a qu’une seule qui compense cette


    contrefaçon. En effet, il résulte des états de la douane belge qu’il a été importé et mis en consommation :

    années. livres en feuilles,
    brochés,
    cartonnés ou reliés.
    valeur.
    En 1836. 143,601 kilogrammes. 881,100 francs.
    En 1837. 149,745 923,089
    En 1838. 159,358 973,210
    En 1839. 153,362 939,636
    En 1840. 148,856 916,512
    En 1841. 154,311 952,182
    En 1842. 162,695 1,004,180

    Les importations de la France figurent dans ces chiffres pour les quatre cinquièmes de la valeur totale. En 1842, elles ont été de 810,065 fr. Ce qui explique cette singularité, c’est que la contrefaçon belge ne réimprime que les ouvrages d’auteurs vivans ; elle n’essaie pas de disputer à la librairie française la réimpression des livres tombés dans le domaine public.

  1. La Société d’imprimerie et de fonderie, que nous désignons ici, a fabriqué (indépendamment des ouvrages continués) :

    278 volumes in-8o et in-18 en 1837.
    195 en 1838.
    210 en 1839.
    197 en 1840.
    196 en 1841.
    175 en 1842.