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déjà restreint aux peuples de ce nom relevant du souverain de Poonah ; les provinces conquises lui avaient et enlevées. Le fils de Ragobah, abandonné de ceux qui avaient accueilli son père dans sa disgrace, fut forcé de se retirer, à la suite de bien des vicissitudes, devant Badji-Rao, que réinstallèrent définitivement les victoires du général Welesley. Ce fut en mai 1803 que l’ordre fut rétabli dans les Ghautts, voici à quelles conditions : le prince mahratte acceptait le régime subsidiaire, reconnaissait la souveraineté de ses alliés et renonçait à la direction de sa politique extérieure. Le pechwa était protégé et séparé des autres chefs de la confédération contre lesquels la guerre allait se continuer. Nous verrons bientôt quelle circonstance amena la compagnie à le déposer. Les citadelles qui tenaient encore pour l’autre prétendant capitulèrent à la longue ; il y en avait que l’on ne pouvait réduire que par la famine, et elles bravaient impunément l’autorité du souverain jusqu’auprès de sa capitale ; au nombre de ces forts, on comptait celui de Logar, dont nous avons parlé plus haut, et qui est éloigné de Poonah à peine de dix lieues.

Quand on arrive près de cette ville et qu’on voit un espace de deux milles carrés tout au plus couvert de maisons d’assez médiocre apparence, on comprend que ce n’est pas là le chef-lieu d’un royaume commerçant, industrieux, ami de la paix. Poonah ressemble à un bourg qui a grossi, et n’a pas, la grandeur qui convient à une cité célèbre à tant de titres. Du côté de l’ouest coule une rivière à peu près à sec pendant l’hiver, assez encaissée, large de trois cents mètres, sur laquelle on aperçoit des arches de pont à moitié bâties ; les dieux ne s’étant point montrés favorables à l’achèvement de ce travail, deux fois interrompu par des causes naturelles, les brahmanes ont déclaré qu’il n’y avait pas lieu à continuer l’entreprise. Ce cours d’eau, nommé la Moula, tombe tout près de la ville, dans la Mouta ; c’est au confluent de ces deux rivières, considéré comme un lieu particulièrement saint, que les veuves avaient coutume de se brûler sur le corps de leurs époux[1]. La Mouta se jette dans la Bhîma, qui se mêle elle-même au Krichna, dont les eaux se déversent dans le golfe du Bengale. Ainsi par une suite de rivières ; dont la première prend sa source à vingt-cinq lieues de la baie de Bombay, on peut, au temps des crues, traverser toute la presqu’île en bateau, moins ce court trajet, et se rendre de Poonah au rivage de Golconde[2]. Le Krichna, fleuve sacré, véritable, frontière

  1. Cet usage n’a été aboli qu’en décembre 1829, par un acte de lord Bentinck.
  2. Par compensation, la chaîne des Ghautts, interrompue un instant par des ravins immenses près de Paniany, livre passage à la rivière de ce nom, qui, partie de Coimbatour sur la côte de Coromandel, vient se perdre du côte de celle de Malabar, dans l’Océan indien.