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commença par traduire quelques œuvres éminentes des littératures étrangères. Parmi les traductions qu’il fit alors, on remarque celle du livre anglais de Philips sur les attributions du jury. La révolution de 1820 éclata pourtant, bientôt suivie de l’intervention française ; quelques années après cette intervention, quand la première terreur se fut enfin dissipée, la jeunesse libérale de Madrid s’indigna de n’avoir point d’organe. Nous ne savons comment elle s’y prit pour obtenir que le gouvernement ombrageux de Ferdinand VII tolérât la publication d’un journal[1] ; quoi qu’il en soit, à la fin de 1832, le Boletin del comercio fut fondé ; c’est ce journal qui, devenu l’Eco del comercio, est en ce moment le doyen de la presse de Madrid. L’Eco était dirigé par un des plus fiers et des plus fermes caractères du moderne libéralisme espagnol, don Fermin Caballero, ancien ministre de l’intérieur sous le ministère Lopez, aujourd’hui même une des notabilités du parti exalté, dont M. Gil y Zarate est demeuré l’ami en dépit de ses opinions modérées. M. Gil y Zarate compta parmi les plus actifs et les plus assidus rédacteurs de l’Eco jusqu’à l’époque - vers 1835 - où le journal arbora franchement la bannière ultrà-progressiste. Et d’ailleurs, depuis quelque temps, la révolution installée au palais de Ferdinand VII appelait de tous côtés aux affaires les hommes de cœur et d’intelligence. Le tour de M. Gil y Zarate vint en 1836 ; le cabinet, composé des meilleurs noms du parti modéré, M. le duc de Rivas, M. Isturitz, M. Alcala-Galiano, lui confia un emploi important au ministère de l’intérieur. Dans ce même ministère, M. Gil y Zarate avait fait déjà ses preuves pendant les troubles de 1820. Le cabinet Isturitz s’étant retiré devant la ridicule échauffourée de la Granja, M. Gil y Zarate rentra dans la vie purement littéraire. En 1840, son emploi lui fut rendu par M. Pérès de Castro ; mais les évènemens de Barcelone et la chute de Marie-Christine le contraignirent à le résigner une seconde fois. Réinstallé à l’intérieur, en juin 1843, par le cabinet Lopez dont faisait partie son ami don Fermin Caballero, M. Gil y Zarate s’y est jusqu’ici maintenu. À l’heure même où nous écrivons, M. Gil y Zarate est le chef d’une section

  1. En sa qualité de roi absolu, Ferdinand VII n’aimait point les journaux, à moins pourtant qu’il ne les fit faire ou ne se donne la peine de les écrire lui-même. Durant les troubles de Madrid, très peu de temps avant l’intervention française, un journal prodiguait chaque jour les plus violentes injures non-seulement à sa majesté espagnole, mais à tous les princes de l’Europe, et particulièrement à Louis XVIII. Ses diatribes ne furent pas, dit-on, étrangères à la détermination que prit Louis XVIII d’envoyer une armée au secours de son royal cousin. Or, on prétend que ce journal avait pour principal rédacteur le roi Ferdinand, septième du nom.