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par son excédant à l’insuffisance des récoltes voisines, les sécheresses entraînent souvent la disette. A l’époque où je visitais le Brésil, le riz était devenu fort cher ; au lieu de 6 francs l’alquiere, il coûtait 30 francs. La révolte qui avait éclaté dans la province de Minas avait empêché la culture d’un grand nombre de terrains. Il arrive souvent au Brésil que vous passez d’un district où tous les vivres sont abondans, dans un autre où les denrées, telles que le maïs, le manioc et le riz, manquent totalement. Chacun cultive pour ses propres besoins ; si l’on perd sa récolte, il faut savoir souffrir et attendre une seconde récolte, car vos voisins sont hors d’état de venir à votre secours, n’ayant eux-mêmes recueilli que le nécessaire.

On rencontre bientôt une seconde rivière, le Parahybuna ; d’immenses rochers à pic s’élèvent sur ses bords. Le pont en bois qui existait sur le Parahybuna a été brûlé le 17 juin 1842 par les révoltés de la province de Minas ; il ne reste plus que les piliers en pierre : le gouvernement veut faire reconstruire tout le pont en pierres, afin d’éviter, me disait-on, qu’il soit brûlé de nouveau. Le village de Parahybuna est, comme Paraliyba, une réunion de quelques maisons bâties au hasard ; le seul édifice un peu considérable qui subsiste encore servait jadis aux douaniers chargés d’inspecter toutes les marchandises provenant de la province de Minas, et de saisir l’or ou les diamans qu’on aurait voulu soustraire au paiement des droits ; aujourd’hui, les droits étant perçus sur les lieux mêmes, il n’y a plus de douane, et j’entrai librement dans la province de Minas, après avoir acquitté le droit de péage pour le bac et pour la route qui est en voie de construction. Cette province a été, en 1842, le théâtre d’une insurrection considérable. La destruction du pont de Parahybuna fut un des premiers actes de la révolte, les insurgés voulaient arrêter ainsi la marche des troupes qu’on devait envoyer contre eux. Quelques détails sur ce mouvement politique feront connaître la situation des partis dans le Brésil.

La majorité de don Pedro II ayant été proclamée avant l’époque légale, les ambitions politiques s’étaient mises en mouvement pour exploiter l’agitation qui avait suivi cette mesure. L’opposition avait triomphé dans Les élections de 1840, et le ministère, regardant les chambres nouvelles comme hostiles au pouvoir, saisit un prétexte pour les dissoudre avant leur convocation. L’opposition fit alors un appel à la force : députés et sénateurs se mirent en rapport avec les hommes influens des provinces ; ils réussirent aisément à inspirer l’esprit de désordre à des propriétaires perdus de dettes, et dont les esclaves