Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 7.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

étaient engagés. Il ne restait plus qu’à soulever les masses. Le ministère avait mis à exécution une mesure qui modifiait l’institution du jury et qui l’annulait de fait, en soumettant la décision des jurés au contrôle du juge en droit du district on s’empressa de proclamer que la monarchie était en danger, que le ministère violait la constitution, enchaînait la volonté de l’empereur, il fallait s’armer pour défendre les institutions ; l’établissement d’une république fédérative était le but non avoué de tous les efforts, de toutes les espérances. Les provinces de San-Paulo et de Minas-Geraës obéirent à l’impulsion qui leur était donnée ; les troubles de San-Paulo durèrent peu, les chefs de l’assemblée provinciale s’étaient trop pressés, ils avaient devancé le mouvement de la province de Minas. Le baron Caxias, général des troupes de l’empereur, eut bientôt rétabli l’ordre dans la population de San-Paulo, et marcha contre l’autre province, celle de Minas, qui venait de prendre les armes. C’est sur ce nouveau théâtre que l’insurrection se développa dans toute sa gravité.

Une assemblée populaire eut lieu à Barbacena ; les membres de la municipalité, s’étant mis à la tête des rebelles, élurent pour chef José Feliciano, sénateur d’un caractère faible, de mœurs très douces, mais très ambitieux. Ayant déjà occupé pendant deux ans la présidence de la province José Feliciano avait été en rapport avec toutes les municipalités ; il était connu et aimé de tous les habitans. Le nouveau président accepta le rôle de chef ostensible de la révolte ; , il publia une proclamation et un manifeste aux Mineiros (habitans de la province de Minas) ; quelques passages de ce manifeste sont assez curieux pour que je les transcrive.

« Mineiros ! quand la patrie est en danger, le devoir de tout citoyen est de voler à son secours ; quand la liberté est foulée aux pieds par un gouvernement ambitieux, tout homme libre doit s’armer ; sauvons la Constitution qu’une faction astucieuse parvenue au pouvoir veut annuler. Le recrutement le plus barbare est venu décimer les populations industrielles ; on a jeté dans les fers, dans les prisons, les citoyens les plus distingués, qui n’avaient commis d’autre crime que de repousser la faction dominante. Le plan liberticide des ministres a été consommé avec l’adoption par les chambres d’une réforme de notre code criminel et de procédure. Le Brésil avait élu en 1840 une chambre qui devait représenter les véritables intérêts du pays ; cette chambre, avant d’être convoquée, a été dissoute. La province de San-Paulo s’est émue et a pris les armes pour défendre le trône et la constitution. C’est à nous de suivre son noble exemple. Respecter les droits de chaque