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dépérissent dans la torpeur ; qu’on indiquât, qu’on facilitât au milieu d’elles les exploitations profitables, en y dirigeant les capitaux par les canaux du crédit, et bientôt on verrait les campagnards de la Franche-Comté ou du Périgord envoyer des produits agricoles à Mulhouse, Rouen, à Reims, et demander en retour des vêtemens. Cet échange donnerait lieu à un double phénomène. Un surcroît de vente, animant la fabrication, élèverait le prix de la main-d’œuvre : en même temps, les denrées envoyées pour payer les objets manufacturés feraient baisser sur les marchés le prix des substances alimentaires. Ainsi, se trouverait réalisée la seule condition qui puisse améliorer le sort des ouvriers, la hausse des salaires, coïncidant avec l’abaissement du prix des subsistances.

Ordinairement, lorsqu’on augmente la production, c’est surtout en vue du commerce extérieur. Cette vieille habitude a survécu à l’une des erreurs dont l’économie politique a fait justice. A l’époque où l’on appréciait la richesse d’un pays par la somme des métaux précieux qu’il renfermait, les hommes d’état dédaignaient le commerce intérieur, parce que, disait-on, ce trafic ne peut que déplacer l’argent déjà répandu dans le pays, et non pas en augmenter la masse. On ignorait alors que ce déplacement de l’argent provoque la création de mille produits variés qui comptent autant dans le bilan d’une nation que les trésors métalliques. Le commerce extérieur, qu’il ne faut certes pas négliger, dégénère presque toujours en une guerre de concurrence que l’entrepreneur soutient en réduisant les salaires. Il y a au contraire profit pour tout le monde à augmenter, la consommation interne en vivifiant les entreprises stagnantes. L’industrie qui souffre le plus chez nous est celle qui constitue notre véritable richesse, l’agriculture. Les moindres perfectionnemens dans cet ordre de spéculations ont cependant des résultats merveilleux. Le revenu quotidien que donnent les moutons est environ de 2 centimes par tête. Suivant nos agronomes, il serait facile de porter ce bénéfice à 1 centimes. Or, M. Michel Chevalier a calculé qu’à cette insignifiante augmentation de 2 centimes par mouton et par jour, la France gagnerait annuellement 235 millions ! Cette richesse nouvelle contribuerait à entretenir l’activité dans nos ateliers, tout en procurant aux pauvres une nourriture plus substantielle.

Le principal instrument des réformes économiques est un bon système de communications. Sur ce terrain, M. Chevalier triomphe : les divers moyens de locomotion et de transports, telle est son étude de