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en Grèce et en Europe le plus fâcheux effet. M. Maurocordato a fait des fautes et toléré des actes déplorables, rien n’est plus certain ; mais quel patriote en Grèce peut oublier ce que le pays lui doit ? Pour ma part, je n’hésite pas à le dire, la mise en accusation d’un homme tel que M. Maurocordato serait le coup le plus fatal que pût recevoir en Grèce le régime constitutionnel. A la vue d’un acte pareil, il n’est pas un philhellène dans le monde qui ne détournât les yeux avec douleur et dégoût.

Il ne paraît d’ailleurs pas douteurx que, soit dans le sénat nommé par M. Maurocordato et qui se compose, quant à présent, de vingt-sept membres seulement, soit dans la chambre des députés récemment élue, le ministère Coletti-Metaxas n’ait la majorité. Satisfaite de voir M. Metaxas au pouvoir, la portion saine du parti russe doit, selon toute apparence, lui prêter appui. D’un autr » côté, il y a lieu d’espérer que, par ses relations antérieures, M. Coletti parviendra à rallier quelques chefs palikares dissidens et une fraction du parti démocratique. Dans le parti russe, comme dans le parti démocratique, il restera pourtant un noyau qui, dans des vues diverses, cherchera à troubler le pays, et ce noyau sera à peu près sûr de trouver à la légation russe, soutenue, comme d’habitude, par les légations autrichienne et prussienne, un appui ferme et constant Quant au parti anglais, après sa mésaventure il ne lui reste qu’une ressource, celle d’abjurer de funestes conseils, et de reprendre place dans le parti national, mais on peut craindre que d’une part le ressentiment d’une défaite récente, de l’autre l’influence exclusive à laquelle il s’est soumis, ne lui en laissent pas la faculté. Il est naturel que la légation anglaise, surtout si elle a joué le rôle qu’on lui prête, ne soit pas satisfaite, de ce qui s’est passé. Reste à savoir si l’expérience sera suffisante, et si les hommes honorables consentiront à la suivre jusqu’au bout.

Quoi qu’il en soit, on ne saurait trop le répéter, il n’y a eu, dans toute cette affaire, ni complot, ni trahison ; ce que la légation française avait promis de faire, elle l’a fait avec une parfaite loyauté, et malgré les reproches qu’elle encourait. Ce n’est donc pas plus le parti français que le parti russe, c’est le parti grec qui, par ses propres ressources, vient de triompher glorieusement. Il faut à présent qu’il use de la victoire avec sagesse, avec prudence, avec modération.

Maintenant je mets de côté toutes les difficultés, tous les embarras, toutes les intrigues politiques, je ne tiens compte ni des partis anciens ou nouveaux, ni des légations étrangères, et j’examine en elles-mêmes les deux questions que voici : La Grèce, telle que l’a faite le traité de 1832,