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nécessité de l’union, et cette union est aujourd’hui sinon inébranlable, du moins assez solide pour qu’on puisse y compter. On comprend qu’entre des avis si divers il soit impossible de choisir surtout quand on n’est pas sur les lieux Au moment même où cet écrit paraîtra, la question d’ailleurs sera peut-être vidée. Il y a quatre portefeuilles vacans, et d’un commun accord on en a ajourné la distribution après la constitution de la chambre. Or, si la scission doit promptement éclater, ce sera probablement sur ce terrain. S’il était vrai, par exemple, que M. Metaxas, non content de demander le ministère de la marine pour l’illustre Canaris, demandait également le ministère des affaires étrangères pour M Zographos ; s’il était vrai qu’il voulût ainsi s’entourer des membres les plus actifs du vieux parti russe, tout en isolant M. Coletti, alors on pourrait, presque à coup sûr, prédire une nouvelle crise. Or, les dernières nouvelles ne laissent pas les amis de la Grèce sans quelque inquiétude sur ce point.

Ce n’est pas tout, et il va se présenter dès le début de la session une difficulté d’une autre nature. Il existe malheureusement en Grèce une rivalité déplorable entre les autochtones et les hétérochtones, c’est-à-dire entre ceux qui sont nés sur le territoire actuel de la Grèce et ceux qui sont nés au dehors. Or, les Péloponésiens, qui sont à la tête du parti autochtone, se plaignent vivement, dit-on, que dans le ministère nouveau, sur quatre ministres, il n’y ait qu’un indigène, M. Balbi. M. Coletti est Épirote, M. Metaxas, Céphalonien, M. Tzavellas, Souliote. Les Péloponésiens demandent donc avec vivacité, avec menace, que les portefeuilles vacans soient distribués parmi eux, et il sera difficile de résister à leurs réclamations.

Enfin, en supposant que le ministère nouveau surmonte heureusement cette double difficulté, en supposant qu’il se complète sans rompre l’union de MM. Métaxas et Coletti, sans perdre l’appui des Péloponésiens, encore faudra-t-il ; s’il veux vivre, qu’il résiste avec énergie, avec constance aux projets réacteurs de ses propres amis. Il y a trois mois, le parti napiste paraissait écrasé en Grèce ; les fautes du dernier cabinet, l’union de M. Metaxas et Coletti, ont relevé ce parti, et c’est avec une joie presque désespérée qu’il est revenu au pouvoir. Tous ses efforts tendent donc à provoquer contre le dernier ministère une réaction violente ; à l’entendre, tout ami du dernier ministère doit être écarté de toute fonction publique ; à l’entendre encore, M. Maurocordato et ses collègues ne sont pas assez punis par leur chute, et la chambre ne peut manquer de les mettre en accusation. Ce sont là de funestes projets, et qui, s’ils étaient écoutés, produiraient