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moindre sentiment de pitié sympathique, au bruit des sifflets et des huées de l’Europe entière, comme une nations d’imbéciles, de méthodistes et de vieilles femmes. »

Ces prédictions sinistres, nous ne les prenons pas à la lettre, et même en 1808 il n’est pas probable qu’elles se fussent jamais réalisées. Pour forcer les tories à être justes envers l’Irlande, l’auteur des Lettres de Plymley usait d’une tactique permise ; il mettait en jeu un moyen qu’il faut croire infaillible, puisqu’il a réussi tant de fois en politique, la peur. Cependant les lignes qu’on vient de lire, toute exagération à part, ont encore une signification ; elles prouvent que, par bonheur pour le repos des peuples, tous les empires ont leur endroit vulnérable, et son retenus par le sentiment secret de cette faiblesse dans la carrière illimitée de l’ambition. Si notre point douloueux est l’isolement, suite inévitable de nos révolutions et de notre gloire, celui de l’Angleterre, c’est l’Irlande : toujours mécontente, l’Irlande lui lie les mains, et ses exigences croissent avec les embarras de l’empire.

Il était impossible que le spirituel membre de l’église établie, si impitoyable à l’égard des préjugés politiques de son ordre, montrât plus d’indulgence pour les travers des sectes dissidentes. Certes, celles-ci offraient encore plus de prise à ses railleries, et s’il avait voulu simplement se divertir aux dépens des mille formes bizarres que l’esprit religieux emprunte en Angleterre, les sujets ne lui auraient pas manqué. Cependant, fidèle à l’honnête principe qui l’a dirigé dans tous ses écrits, à savoir que la satire doit avoir l’utilité générale pour but suprême, M. Sydney Smith a épargné la sottise innocente, et n’est allé relancer, parmi les schismes protestans, que la sottise dangereuse. Tandis qu’il a montré presque du respect pour les puérilités des quakers, ces hommes de bien, volontaires parias de la société politique, il a été un des premiers à dénoncer les folies dangereuses du méthodisme. C’est surtout depuis le commencement du siècle que les disciples de Wesley et de Whitfield ont fixé sur eux l’attention de la presse et des hommes publics en Angleterre. M. Sydney Smith, dès les premières années de la Revue d’Édimbourg, a manifesté sa répugnance particulière pour cette secte entreprenante, très mystique dans ses dogmes, très profane dans sa propagande. Ce n’est pas, comme on le pense bien, les détracteurs du culte légal qu’il a poursuivis dans les nouveaux religionnaires : il lui a semblé que leur ardeur de prosélytisme, qui les jetait sur tous les rivages habités par la grande famille britannique, menaçait d’un double péril la tranquillité intérieure de l’Angleterre et la sécurité de ses possessions coloniales. Pénétré