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deux partis ; en 1812, l’insurrection d’Espagne les unit, elle montrait aux royalistes qu’ils pouvaient tourner la révolution contre Napoléon, et aux démocrates qu’ils pouvaient marcher sous le drapeau des anciens maîtres.

Une circonstance particulière amena la Sicile à prendre alors l’initiative révolutionnaire. La tyrannie de Ferdinand IV et de Caroline d’Autriche avait exaspéré la population. C’est à Messine que l’on conspira d’abord ; la cour se livra à d’atroces réactions ; le duc d’Artali, délégué à Messine, soumit des centaines de détenus à d’épouvantables tortures ; dès-lors l’indignation fut universelle. On sait comment, grace à l’appui de lord Bentinck, la révolution triompha de la cour. Le général anglais, exposé avec ses troupes à de nouvelles, vêpres siciliennes, se rangea du côté du peuple, relégua Ferdinand et Caroline à la campagne, leur imposa la constitution d’Espagne et transforma l’ancien parlement sicilien en un parlement constitutionnel. Ferdinand et Caroline s’efforcèrent encore de lutter par un coup d’état et par un massacre : Bentinck contint le roi par une démonstration militaire et fit expulser la reine de la Sicile. Devenu populaire, le général anglais se mit à la tête de la propagande royaliste et révolutionnaire contre Napoléon. Ses émissaires agitèrent les Calabres, le carbonarisme était évangélique ; transformé par l’influence anglaise, il se fit constitutionnel ; soutenu par la cour de Palerme, il entraîna les prêtres, il exalta les dévots ; on promit le paradis à ceux qui prenaient les couleurs de la secte, et le mouvement devint redoutable ; Murat, irrité, fit exécuter en 1813 le chef des carbonari, Capobianco, mais ce châtiment rigoureux n’empêcha point la secte de pénétrer à Naples, puis à Rome, et jusque dans les rangs de l’armée napolitaine. Quinze généraux voulurent changer la direction du mouvement ; ils conspirèrent en 1814 pour imposer une constitution à Murat et s’emparer de la Romagne. Le général Pepe proclama la constitution à Sinigaglia : il était le premier et le seul murattiste ouvertement constitutionnel. Ses tentatives restèrent sans effet.

La propagande de lord Bentinck, mieux servi par les circonstances, se continuait avec plus de succès. Lord Bentinck promettait l’ancienne république aux Génois. Le mouvement révolutionnaire gagnait le centre même du royaume d’Italie, Milan. Là le parti libéral, très faible, se ralliait aux partisans de l’Autriche, plus tard, les négocians de Milan devaient envoyer secrètement M. Azimonti et un autre émissaire a Gênes auprès de lord Bentinck, pour l’assurer de leur adhésion à la propagande libérale de l’Angleterre. Les alliés secondaient le général