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Palerme ordonna immédiatement l’armement des guérillas, et un emprunt de 2 millions et demi. Ainsi, l’impulsion était donnée : Palerme voulait son parlement de 1813 ; d’un autre côté, Ponte-Corvo et Benevento s’agitaient dans les États Romains. Malheureusement la propagande ne pouvait pas soulever Parme, Modène, la Toscane, les quatre Légations : en Lombardie, le comte Confalonieri ne pouvait pas non plus réunir assez de forces pour s’insurger. Le Piémont fut seul à répondre à l’appel, quatre mois plus tard, quand les Autrichiens marchaient déjà sur Naples. En Piémont, les carbonari et les bonapartistes avaient un point de ralliement ; le prince de Savoie-Carignan, de la maison cadette, s’entourait de tous les représentans de la fédération italienne ; il avait accepté le rôle de libérateur de l’Italie, et les fils des conspirations de Gênes et de Milan se réunissaient entre ses mains. La révolution d’Espagne, celle de Naples, l’occasion qui se présentait de tomber sur les derrières de l’armée impériale engagée dans la Basse-Italie, la haine contre l’Autriche, le besoin de forcer le gouvernement piémontais à donner des garanties, tout concourait à soulever les esprits. Le général autrichien Bubna insistait auprès de la cour de Turin pour occuper quelques places fortes du Piémont, et la nécessité d’éviter une seconde occupation autrichienne ne laissait pas le choix entre l’action et l’inaction. Le 11 janvier, il se formait à Turin des rassemblemens d’étudians, et la garde royale les sabrait dans les salles de l’Université : l’irritation augmentait, et le mot d’ordre était donné. Tout à coup le prince de Carignan hésite, recule : le mouvement fut contremandé ; mais il était trop tard. Le 10 février, Alexandrie s’insurge ; le régiment de Gênes, les carbonari et les étudians s’unissent et proclament le royaume d’Italie. Asti, Pignerol, d’autres villes se soulèvent aux cris de guerre à l’Autriche, vive la constitution. Turin est entraîné par un coup de main qui livre la forteresse aux fédérés. Pendant quelques heures, le peuple était resté indifférent ; les fédérés et l’armée étaient en présence, personne n’osait engager le combat, et la ville assistait en silence à ce spectacle. A une heure après midi, trois coups de canon de la citadelle annoncèrent que la garnison fraternisait avec les carbonari, et la population se décida pour la révolution. Le prince de Carignan, député par la cour à la citadelle pour rétablir l’ordre, retourna vers le roi ; il le somma d’accorder la constitution d’Espagne, et de déclarer la guerre à l’Autriche. Le roi abdiqua en faveur de son frère, Charles-Félix, et comme le nouveau roi était absent, on confia la régence au prince de Carignan. Ce fut là le dernier succès de la révolution.