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Quelle étaient les forces des insurgés ? A Palerme seulement, la révolution avait le caractère d’un mouvement populaire ; mais ce mouvement était dirigé contre le parlement napolitain. A Naples, la révolution était un coup de main des carbonari secondés par les bonapartistes. Les premiers, inconnus, sans représentation officielle, vrais conspirateurs du moyen-âge, se trouvèrent isolés devant le peuple comme les républicains de 1799. Les bonapartistes revinrent au pouvoir appuyés sur les idées de Murat. Ils gouvernèrent comme si la guerre n’eût pas été imminente et comme s’ils ne se fussent pas trouvés à la tête d’une insurrection. L’Italie centrale et la Lombardie ne comptaient pas ; l’insurrection piémontaise avait pour chef le prince de Carignan, qui l’acceptait malgré lui, et, par une de ces bizarreries qu’on rencontre à chaque pas sur la terre italienne, Gênes et Turin ne conspiraient ensemble que dans le but de se séparer après la victoire.

Après un premier moment de trouble, les absolutistes n’eurent pas de peine à reprendre l’avantage. Le roi de Naples se servit des bonapartistes napolitains, séduits par ses démonstrations libérales, pour réduire Palerme, contenir les carbonari, arrêter la propagande dans le royaume, et obtenir du parlement la mission de plaider au congrès de Laybach la cause de l’insurrection napolitaine. A Laybach, la sainte alliance avec l’adhésion de Louis XVIII et de l’Angleterre, chargea l’Autriche de combattre la révolution italienne. L’armée impériale, forte de quarante-deux mille hommes, commandée par le général Frimont, marcha sur Naples en ramenant Ferdinand IV dans ses états. Ce fut alors que l’insurrection napolitaine, réduite à combattre pour se défendre, put comprendre quelles étaient ses forces. Le peuple napolitain aimait mieux voir Ferdinand IV persécuter des libéraux que de se battre contre les Autrichiens pour une constitution : il s’expliqua à sa manière. Conduit à la guerre malgré lui, en présence de l’ennemi, il reçut les proclamations de Ferdinand IV, qui lui demandait d’accueillir les Autrichiens comme des frères. Les désertions se multiplièrent au point que le général Pepe crut devoir quitter une forte position pour hâter le combat. On se battit à Rieti ; la déroute fut complète. Le général Carascosa n’eut pas un meilleur sort : on assure que les soldats déchargeaient leurs fusils sur les officiers qui voulaient les retenir sous les drapeaux. Vaincue à Naples, la révolution se réfugia à Messine, où le général Roussaroll proclamait la république et prenait le titre de général en chef de Sicile et des Calabres. Roussaroll tenta un débarquement dans les Calabres, et on lui