Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 8.djvu/646

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

années à des études qu’il paraît croire ne demander que quelques mois M. de Genoude a une ardeur qui dénote sans doute sa bonne foi, mais qui, en se portant sur mille objets, l’empêche de laisser nulle part une trace qu’on puisse vraiment remarquer. Tour à tour théologien littérateur, orateur sacré, et en dernier lieu historien, le rédacteur en chef de la Gazette de France s’est attaqué à bien des sujets, depuis traduction de la Bible jusqu’à la Raison monarchique. Il serait injuste de dire qu’il écrit mal, mais on ne saurait dire non plus qu’il écrive bien. Enfin, si M. de Genoude avait autant de mérite que de zèle, autant de force que d’activité, ce serait un grand homme.

Quand on compare l’état actuel de la presse légitimiste à son passé, on peut mesurer toute la profondeur de sa décadence. Son histoire se partage en trois époques principales. A la fin du dernier siècle, en 1796 et en 1797, MM. de Bonald et de Maistre relevèrent avec hardiesse et génie la cause et l’image de l’antique monarchie en face de la révolution victorieuse. En 1816, M. de Chateaubriand, par la Monarchie selon la Charte, et deux ans plus tard par le Conservateur, rendit aux principes légitimistes l’insigne service de montrer qu’ils n’étaient pas incompatibles avec la liberté et l’opposition constitutionnelles : ce fut l’apogée de la presse royaliste. Depuis 1830, cette presse, sans direction, sans boussole, sans unité, ne s’est plus guère signalée que par des colères et des inconséquences, et elle a pour principal représentant M. de Genoude.

Se mettre sur le terrain de la révolution pour mieux la combattre a paru au rédacteur en chef de la Gazette de France une idée heureuse, un coup de parti, et tel est le plan de campagne qu’il suit opiniâtrement depuis plusieurs années. Mais qu’en est-il advenu ? Les démocrates ardens ont trouvé dans ces concessions la preuve qu’ils avaient eu complètement raison dans le passé, et qu’ils n’avaient pas besoin des amis de la Gazette de France pour l’avenir. D’un autre côté, les légitimistes les plus convaincus ont refusé de suivre M. de Genoude dans une tactique qui leur paraissait une véritable abjuration de leurs principes. Ainsi la doctrine si laborieusement échafaudée par la Gazette est la risée des démocrates et le scandale des plus purs royalistes.

Pour l’immense.majorité constitutionnelle, quel intérêt pourrait-elle prendre à toute cette politique ? M. de Genoude demande la périodicité des états-généraux : nous avons deux chambres qui s’assemblent tous les ans ; il réclame l’affranchissement des communes et la répartition de l’impôt par des assemblées provinciales : nous avons une organisation municipale et départementale sagement combinée avec