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atteinte à l’indépendance spirituelle de l’église en touchant à son établissement temporel. La situation intérieure de l’église anglicane n’offrait pas un aspect plus rassurant. La vie morale qui éclatait avec tant de vigueur et de confiance dans les rangs de ses adversaires se retirait peu à peu et avait comme disparu de son sein. M. Gladstone a tracé de l’état du clergé à cette époque une peinture d’une vérité sévère et qu’il peut être intéressant de reproduire ici. « Les mœurs du clergé devenaient, dit-il, de plus en plus séculières. Sauf des exceptions individuelles, elles étaient au-dessous du niveau qu’exige sa vocation élevée. Les jeunes gens destinés à recruter ses rangs ne se soumettaient à aucune retenue. Ils passaient, à l’époque de leur ordination, d’une vie indifférente ou dissipée à des habitudes plus décentes, comme s’ils obéissaient plutôt à un intérêt mondain qu’à une émotion religieuse et à un entraînement réel vers les fonctions les plus sacrées. Le type du prêtre dans sa sainteté était presque effacé. L’église d’Angleterre arrivait avec une effrayante rapidité à devenir ce qu’un énergique écrivain a brutalement appelé une comédie. C’était une vaste organisation ayant pour but apparent de communiquer à tous les membres du pays les graces et les vérités divines ; mais en réalité elle ne semblait pas avoir d’autre portée que d’assurer des cadets de famille, à des précepteurs, à des hommes incapables, les moyens d’une existence indépendante et une position dans le monde. »

Dans cet état de choses, contre l’inflexible audace de l’esprit philosophique, contre les infatigables assauts des sectes dissidentes, il eût été impossible à l’église d’Angleterre de tenir long-temps, uniquement appuyée sur les ais vermoulus de l’utilité politique. Ce fut dans ce moment où le danger était plus menaçant encore au dedans qu’au dehors qu’eut lieu ce qu’on pourrait appeler la renaissance catholique d’Oxford. Une même pensée réunit quelques clergymen de cette université, MM. Pusey, Palmer, Williams, Newman, des hommes chez lesquels les adversaires qu’ils se sont plus tard attirés n’ont jamais contesté la sincérité de la foi et la charité des intentions ; ils voulurent tenter de sauver l’église par elle-même, de relever ses principes oubliés, de lui rendre le prestige des traditions sur lesquelles se fonde l’église d’Angleterre, qui, pour être séparée de la communion romaine, ne prétend pas moins à conserver les caractères fondamentaux du catholicisme. Ils écrivirent d’abord de petits traités où étaient exposés les principaux points de la foi et de la constitution de l’église anglaise ; ces brochures publiées modestement sans nom d’auteur, mais qui laisseront un long souvenir