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desservies ici par le meilleur des systèmes de communications, voisines de populations nombreuses et riches, tous les travaux seront faciles, toutes les entreprises profitables. Enfin, la face des dunes qui regarde la mer change perpétuellement de forme sous l’action des vents dont elle est battue, des lames qui la sapent, des pluies qui la ravinent ; il suffit d’une tempête pour rendre certaines parties de la côte méconnaissables, et les naufrages si fréquens qui en font l’effroi des navigateurs n’ont souvent d’autre cause que les erreurs où les jettent ces changemens d’aspect. Ce n’est pas là le moindre motif de travailler à la fixation des dunes de la Manche ; il n’y a pas d’autre moyen d’effectuer le balisage de la côte, et cette opération n’importe guère moins à la marine que l’établissement des phares.

Il y a déjà des graces à rendre à l’administration du département du Pas-de-Calais pour les encouragemens qu’elle accorde à la plantation, si ce n’est au boisement des dunes. De vastes espaces ont perdu depuis quelques années leur désespérante blancheur et ont pris une teinte verdâtre ; c’est l’effet des plantations d’oyats, qu’on récompense par des primes. L’oyat est une plante de la famille des graminées ; ses racines traçantes, pourvues de milliers de radicules latérales, s’étendent comme un filet dans le sol, et ses tiges percent les couches de sable dont le couvre quelquefois le vent. Il ne ressemble pas au gourbet des dunes de Gascogne, qui manque à celles du nord. Le gourbet, dont les racines s’enfoncent en faisceau dans le sable, a la précieuse propriété de réussir surtout près de la mer et de se nourrir de son écume ; mais pour les lieux élevés il ne parait pas valoir l’oyat. L’alliance de ces deux plantes, dont les effets se compléteraient réciproquement, résoudrait les plus grandes difficultés de la fixation des dunes. Les plants d’oyat se placent en quinconce, à environ 0m60 les uns des autres ; ils n’affermissent pas seulement le sol par le réseau de leurs racines ; le balancement de leurs tiges suffit pour troubler la marche du vent et le dépouiller des grains de sable en suspension dans la couche où elles s’agitent : aussi voit-on l’oyat se chausser naturellement, et c’est un fait populaire dans le pays qu’une dune plantée s’exhausse. Il ne reste donc plus qu’à couvrir les dunes de semis d’arbres résineux pour les fixer définitivement et décupler leur valeur en quelques années. Leur largeur moyenne est de trois kilomètres, et elles forment trois groupes principaux :

Le premier, au nord de la Canche, a une étendue de 4,100 hectares.
Le second, entre la Canche et l’Authie, a : 3,700 hectares.
Le troisième, entre l’Authie et la Somme a : 2,500 hectares.