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je leur demanderai des documens sur la situation des différens partis ; considérés ainsi, les livres sont aussi des faits. Spectateur désintéressé, nous ne voulons qu’assister à ces luttes et les bien comprendre. Nous ne venons pas indiquer aux cabinets allemands la solution efficace des difficultés sans nombre qui les harcèlent ; de si hautes prétentions ne nous conviennent pas, et ce sera déjà beaucoup que d’avoir fait connaître ces difficultés mêmes. Tel est notre but, et si, en dégageant avec netteté le tableau exact de l’agitation religieuse, nous maintenons certains principes immortels dont la violation serait fatale à toute l’Allemagne, notre tâche, à coup sûr, sera suffisamment remplie.


I.
État de l’église protestante ; les vieux luthériens, les piétistes, les rationalistes, les amis des lumières. — État de l’église catholique ; essai d’église catholique allemande en 1815. — Situation des partis.

C’est de la Prusse qu’est sortie la secte des dissidens catholiques ; c’est en Prusse qu’il faut d’abord étudier l’état des questions religieuses. Aussi bien cette Allemagne du nord est décidément le foyer le plus actif de la pensée germanique ; allons à Berlin, à Halle, à Breslau, si nous voulons savoir où en sont les affaires théologiques chez nos voisins et ce qu’est devenu le protestantisme. Or, deux faits bien curieux résultent de tout ce qui s’est passé sur ce terrain depuis trente ans ; d’abord, on a désiré ardemment l’unité religieuse et ce but a été poursuivi de différens côtés, dans l’église protestante par ceux qui ont voulu réconcilier les diverses communions, dans l’église catholique par quelques tentatives faites vers 1815 pour soustraire l’église à l’obédience complète de Rome et l’attacher plus fortement au sol de la patrie. Tel est le premier fait que nous devons signaler. Le second n’est pas moins grave, et le voici : ces tentatives échouèrent presque partout ; en voulant constituer l’unité des symboles, on ne réussit qu’à irriter les partis, à envenimer les opinions contraires et à les mettre aux prises. Ainsi, le but de l’unité religieuse ardemment poursuivi, et, au lieu de cela, des divisions nouvelles produites par ces tentatives mêmes, voilà le double fait qu’il est impossible de méconnaître dans la situation de l’Allemagne, et qui tout à l’heure nous expliquera bien des choses.

Tout le monde sait qu’il existe deux communions dans l’église protestante, les luthériens et les réformés. Or, ce r’est pas le dernier roi, comme on le pense communément, qui eut le premier l’idée de les